19 avril 2024
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L’Algérie : du patriotisme de pacotille au nationalisme factice

Un pays exsangue

L’Algérie : du patriotisme de pacotille au nationalisme factice

Se connaître et se comprendre soi-même, telle est la condition primordiale pour pouvoir s’intégrer dans une société qui veut avancer. Un postulat qui semble aux antipodes pour une bonne frange d’Algériens.

En Algérie, ils sont beaucoup à exprimer leur amour pour la patrie, mais rare à œuvrer pour la construction d’un État digne de ce nom. Mais quel intérêt réel pour la nation si peu de personnes sont vraiment engagées dans leur vie quotidienne à traduire cet amour en acte ? Le label « patriote », « nationaliste » …est aujourd’hui usité à tort et à travers par quasiment tous les Algériens. Cette mode est plus basée sur l’apparence que sur des faits tangibles qui peuvent être constatés dans les actes quotidiens.

Depuis 56 ans, en Algérie comme ailleurs dans des pays où la liberté est réduite en cendres, la vie humaine est si maltraitée, le droit à la citoyenneté universelle est banni au profit de l’impunité des gouvernants qui rivalisent dans l’oppression, la déprédation et la corruption. Et pour boucler la boucle, des épidémies qu’on croyait disparues à jamais refont surface.

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Le choléra dans l’indifférence du gouvernement

Le choléra s’invite dans la partie sans être invité. Pratiquement, chaque jour vient avec son lot de scandales et de déboires. Cocaïne, choléra, corruption…des cercles vicieux qui empoisonnent le quotidien des Algériens, déjà asphyxiée par une misère qui ne dit pas son nom. Tout cela, dans une indifférence quasi générale autant des « élites » locales acquises au régime ou réduites au silence, que de la pseudo communauté internationale (USA, France et Grande-Bretagne) chantres de l’imposture démocratique et du discours factice sur les droits humains.

Dans cet imbroglio inextricable, la jeunesse algérienne est en proie à tous les fléaux. Incertitude et précarité face à l’avenir, positionnement liminal dans le présent, génèrent craintes et pressions pour cette partie de la population en phase de construction identitaire. En outre, les perceptions et regards stigmatisants drainés par le monde des adultes à leur égard ne facilitent guère la quête d’une confiance assurée et la mobilisation de ressources pour «faire face». Le présent, largement indexé sur un avenir à structurer et composer, est ressenti alors comme une pesanteur.

Dans ces contextes, les effets des addictions sont ressentis comme des temps de parenthèses permettant d’occulter les pressions du quotidien et d’effacer momentanément, par l’oubli, les craintes. Au vu de ces résultats, les logiques de prévention des pratiques alcoolo-toxico-tabagiques – encore largement axées sur une vision médicalisée – questionnent dès lors l’efficience des actions et des médiations avec ce «public cible».

Des patriotes et des usurpations

L’amour de la patrie que veulent imposer vaille que vaille les tenants du régime est voué à l’échec, nonobstant le nationalisme ostentatoire dont s’enorgueillissent les sangsues du pouvoir, agglutinées aux oléoducs et autres gazoducs. S’il existe des Algériens dont l’amour pour leur patrie se vérifie dans leur engagement constant à œuvrer pour le changement, la plupart de ceux qui se targuent d’être patriotes n’agissent guère dans l’esprit de leur prétention. Des usurpateurs de titres pourrions-nous qualifier de telles personnes.

L’Algérie regorge de millions de « patriotes » qui demeurent spectateurs devant les maux dont souffre la mère patrie. La sphère politique est l’un des domaines les plus infectés par cette autre catégorie d’Algériens qui, le jour, sont des patriotes convaincus, et la nuit, des redoutables pourfendeurs de la république. C’est une pratique généralisée qui existe dans tous les secteurs où interviennent les privilégiés de l’État. Quand Samuel Johnson (1709-1784) écrivait que le patriotisme était le dernier refuge des scélérats, il ne parlait pas de l’amour désintéressé et généreux qu’on peut avoir envers son pays, mais plutôt de ce prétendu patriotisme exhibitionniste, dont se servent des gens proches du système, pour masquer leurs intérêts égoïstes et ceux de leur famille.

Aucun parti, aucune région et aucune famille ne sauraient se prévaloir à eux seuls des attributs de la Nation. Parler de patrie, pour les Boutefs et consort, tient de l’effronterie, car la crise de la notion patriotique en Algérie vient de la destruction de cette notion par les manières de gouverner depuis 62 à nos jours qui ont placé le clanisme et le népotisme en premier chef de leurs prises de décisions.

Comment peut-on emprisonner les gens dans un carcan rigidement familial et leur demander d’avoir une attitude patriotique envers ce même Etat qui est désormais synonyme de la famille du Président et donc de l’imposture ?

In fine, beaucoup de choses ont été dites sur les élections précédentes en Algérie et celles qui arrivent à grandes enjambées. Et les commentateurs rivalisent d’ingéniosité et de panache pour nommer ce qu’il conviendrait parfois d’ignorer ou de conspuer. Si ce cirque sérieux ne se prête que difficilement à l’analyse, vu par ses contempteurs les mots pour le qualifier, ont toujours quelque chose à voir avec la crasse, la boue et le déshonneur.

Or, rarement on en a fait l’analyse inverse : ce qu’est l’exercice électoral vu du côté des candidats et politiciens, dont on épuise les Larousse à ne pas trouver d’épithète pour les qualifier. On serait alors surpris de réaliser le peu de courage de nos petits révolutionnaires qui se cachent derrière le clavier via des pseudo, de nos intellectuels critiques et de nos universitaires avec leurs jargons aussi prétentieux qu’austères. Ils sont prompts à critiquer, à s’insurger, à s’indigner, mais lents à l’autocritique. Une lenteur nécessaire pour conforter leur patriotisme de pacotille puisqu’ils réaliseraient par là qu’ils sont aussi responsables de la situation du pays que les épouvantails qu’ils pointent du doigt.

Si l’histoire nous apprend une chose, c’est qu’en politique et en matière de gouvernance de la cité, le vide n’est pas une option. Les fous et les insensés élisent domicile en quartier abandonné par la raison, la science et le bon sens.

À côté des invectives, ces intellectuels connectés aux médias et omniprésents sur internet, mais déconnectés de toute réalité, combien ont déjà pris une seule initiative ? Combien ont manifesté le désir et se sont engagés sérieusement pour prendre des responsabilités ? Jusqu’où le peuple est-il prêt à écouter ces trolls islamistes ? Oui, le peuple est capricieux et paraît irresponsable dans ses choix.

Oui, la proportion des saltimbanques audacieux prétendant diriger est assommante. Oui aussi on peut changer les rapports de force et réduire la probabilité que la population tombe sur un trafiquant notoire ou sur le dernier des escrocs.

Auteur
Bachir Djaider (journaliste et écrivain)

 




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