1 mai 2024
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Les « messies » de 1962 les ont oubliés, les « missionnaires » de 1830 aussi !

Enfants victimes des « évènements » d’Algérie

Les « messies » de 1962 les ont oubliés, les « missionnaires » de 1830 aussi !

Au fil d’une actualité dense qui défile sur vos écrans en permanence, vous tombez parfois sur des informations qui vous renvoient instantanément à votre vécu lointain, à des drames enfouis quelque part dans votre mémoire passive pour ressurgir et tourmenter la partie encore active de vos réseaux neuroniques par un flot de questionnements en relation avec les tragédies occultées de la guerre d’Algérie.

Parmi ces drames, il y en a un sur lequel les guerroyeurs des deux bords ne se sont jamais attardés ni fait preuve de valeurs suprêmes qui confèrent à l’homme un grand H pour l’exposer sur la table du contentieux et du décompte des ravages latéraux de la sale guerre, alors qu’il se devait d’être pris en charge en priorité par les deux parties en belligérance, au lendemain de l’indépendance.

S’il y a une catégorie de victimes collatérales qui nécessitait une attention particulière juste après le 5 juillet 1962, il s’agit bien de ces nombreux enfants que le feu des armes maniées sans précaution par les semeurs de mort des deux bords n’a pas épargnés. À cet égard, l’exemple de Abdelkader K. et du combat qu’il mène depuis plus de 50 ans pour être reconnu victime de guerre, est loin d’être un cas isolé. L’histoire ci-après est celle de deux gamins gravement blessés dont personne n’a songé à réparer les préjudices subis à la fin des hostilités, alors que leur drame avait marqué la mémoire de notre bourgade d’une tragédie collective indélébile, surtout pour ceux que l’enclos de proximité et de complicité générationnelles rapprochaient.

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Nous sommes en 1960. L’une des deux crêtes de notre village juché sur une colline de Kabylie qui surplombe la majorité des villages alentours occupe une position si stratégique qu’elle avait été choisie par l’armée coloniale pour y installer un poste avancé afin de surveiller allées et venues d’hommes et de femmes aux allures ambiguës pour les arrêter, les fouiller et les interroger sur d’éventuelles opérations aux ordres des fellagas. Du petit adolescent au vieillard, tout le monde était suspect. D’autant qu’à plusieurs reprises, les avancées de véhicules militaires suréquipés, essentiellement des blindés, sur la route qui longe nos villages avaient été stoppées par des tranchées creusées la nuit par des civils « volontaires », souvent regroupés avec méthode et entrainés par des hommes qui se réclamaient de la cause libératrice, sans pour autant porter quelconque galon d’authenticité identifiable. Mais bon, ça c’est une autre histoire.

C’est par un bel après-midi d’août que démarre le drame d’Ali et Omar. Le ciel était bleu ce jour-là, le soleil déclinait péniblement de son zénith. Pour vaincre une chaleur torride, nos petites mamans s’essayaient tout aussi péniblement à nous plonger dans une sieste qui, espéraient-elles, les libèrerait de nos gigotements incessants pour jouir de quelques instants de répit en mode relâche. Mais comment se laisser vaincre par Morphée quand une armée de coccinelles déchaînées envahit la cour où nous étions allongés et absorbe toute votre attention par un grouillement de vie diamétralement opposé au monde extérieur qui ne donnait plus aucun signe de sa dynamique habituelle ?  Le village entier semblait plongé dans une quiétude paradisiaque inquiétante pour les « z’rabet » (toupies remuantes) que nous étions. Pas le moindre bruit, pas le moindre son, pas le moindre souffle d’air, synonyme de vie, ne nous parvenait de cet extérieur habituellement agité ! Ils sont tous morts ou quoi ?…me semble être ma dernière pensée…quand…

Soudain, une détonation sourde et puissante éclate au loin et nous fait tous précipiter au balcon duquel nous avions vue imprenable sur la partie basse du village d’où semblait provenir l’explosion. La quiétude et le silence des instants précédents laissent rapidement place à des cris d’enfants et des hurlements de femmes qui jaillissaient de l’afflux mixé que l’on aperçoit se diriger, au pas de course et une cadence disloquée, le long du sentier principal, vers la sortie du village. La nouvelle se répand d’une fenêtre à l’autre, d’un potager à l’autre, d’un balcon à l’autre, et fait très vite le tour pour échoir dans les oreilles de tous les villageois, essentiellement les femmes et les enfants. Les hommes étant souvent absents à ces heures-là. Même de loin, il n’était pas difficile de suivre un enchaînement d’événements annonciateur d’une gravité inédite pour nous, les petits galopins à l’affût de la moindre animation, car l’effet de surprise laisse rapidement place à une cohue indescriptible et des lamentations appuyées par des « Aya bouh almoum’niiiii…iines » (des « au secours », adressés à tous les saints de la Terre) à donner des frissons au plus insensible des humains. Lamentations amplifiées et entrecoupées de complaintes, à gorge déployée, de plus en plus perceptibles « Yemouth Ali-inouuuu….ouu ; Yemouth Omar inouuuu….ouu » (Mon Ali est moooort ! Mon Omar est moooort) hurlés par khalti Dhabia et Na Ouardia, les deux mamans désemparées par ce qui venait d’arriver à leurs petits !

Quelques secondes plus tard, les infirmiers militaires accourent et arrivent sur les lieux de l’explosion. Dans ce fracas de hurlements et de déferlement, on avait du mal à bien distinguer ce qui se passait vraiment au milieu d’un cortège entourant un centre d’attention qui se déplaçait, en trajet retour, vers l’infirmerie. Nous n’avions pas encore eu vent des éléments précis sur ce qui s’était réellement passé que les vrombissements d’un hélicoptère envahissent le ciel pour le remplir de tonalités synonymes d’extrême urgence. L’oiseau de fer géant atterri sur l’unique esplanade à la périphérie du village, embarque Ali, 11 ans et Omar 10 ans, aux urgences de Tizi-Ouzou.

Que s’était-il donc passé ce jour-là ? Les versions allaient bon train et divergeaient d’une explication à l’autre. Chaque enfant témoin, de plus ou moins près de la scène, avait la sienne, mais nous ne le sûmes vraiment que quand Ali et Omar sortirent de l’hôpital…42 jours plus tard !

En ces temps-là, dans nos villages exigus, les sentiers principaux faisaient offices d’uniques terrains de jeux pour dissiper nos inépuisables énergies de galopins. Nous nous disputions quelques coins « spacieux » et autres plateformes stratégiques dès les petits matins annonciateurs de belles journées. Nos jouets, c’était n’importe quelle bricole qui traine par terre et qui tombe sous le regard de nos curiosités avides de « nouveautés ». Ce jour-là, Omar et Ali, en comparses joyeux, s’en allèrent gaiement suivre les traces d’une unité militaire qui venait de longer la piste principale du village, à la recherche de quelconque boîte à ramasser et autre emballage de luxe rejeté par ces soldats qui ne manquaient de rien, pour être recyclé en quelconque gadget par des enfants qui manquaient de tout !  -C’est notre jour de chance, devaient se dire, ce jour-là, Ali et Omar quand ils repèrent quelques babioles aux allures géométriques attrayantes que les soldats avaient laissé choir sur leur passage. À leur vue Omar s’écrie de joie : – « Wa3-Ali, moukel-kane, thifthilines ouroumi » (Eh Ali, viens voir ! y’a des lampes des roumis qui trainent par terre, là !) – « Yagh ath’tidenli, anwali achou yelane dhakhal ! » (Ouvrons-les pour voir ce qu’elles contiennent) …

Après tout, on ne sait jamais, avec ces roumis qui entassent la viande dans des boîtes (le fameux corned-beef qui nous faisait tous saliver à l’époque), ne se pourrait-il pas que ces lampes contiennent des biscuits ? Pour ouvrir ces lampes d’Aladin, en toute innocence, nos deux comparses se mettent à les cogner de toutes leurs forces contre de gros cailloux. À force d’insister, ils y sont arrivés ! … À part qu’au lieu de s’ouvrir franchement, ces « thifthilines » ont explosé brusquement dans leurs délicates petites menottes d’enfants, déchiquetant leurs doigts, éraflant profondément leur peau à divers endroits de leurs corps, et laminant leurs chairs encore en formation. Car, ces lampes étaient en réalité des grenades, fin prêtes à l’emploi ! Sciemment semées pour causer quelques dégâts ou laissées tomber par mégarde par les soldats ? Seul Allah le sait ! Il sait tellement de choses après tout, celui-là, pourquoi ne pas l’incriminer de non-assistance à personne en danger ?

Des explosifs conçus et fabriqués par des hommes pour tuer d’autres hommes, des ennemis qui leurs disputent une vie meilleure sur leurs même et unique mère, la terre, comment empêcher que des enfants qui les manipulent par imprudence en soient déchiquetés et coupés en mille morceaux ? Par quel miracle Ali et Omar ont-ils survécu ? Est-ce par chance ? Est-ce grâce à l’intervention d’une force supérieure à la soldatesque coloniale, à laquelle il faut néanmoins reconnaître la promptitude d’intervention, voire la saluer ? Toujours est-il que nos deux comparses sont encore en vie, en grands-pères toujours aussi joyeux qu’à leurs 10 ans, 57 années plus tard !  Peut-être faut-il traverser de tels drames pour mieux jauger la Vie, l’apprécier et la vivre avec un grand V ? Si c’est le cas, Ali et Omar doivent savoir de quoi il s’agit !

Bien sûr, il y a eu des séquelles. Ils les ont traînées toute leur vie. Ils les traînent encore aujourd’hui. Il suffit de dire bonjour à Ali ou Omar, de leur serrer la main pour distinguer et palper des traces de brûlures marquées à jamais sur leur peau ! Chaque habitant du village a la mémoire encore poinçonnée par les empreintes de ce drame. Chaque salamalec échangé avec eux nous renvoie aux désagréables souvenirs résumés plus haut.

Mais ce qu’il y a sans doute de plus extraordinaire dans l’affaire, c’est que ni Ali ni Omar n’a fait de ses propres malheurs, un drame particulier qui se démarquerait du sort collectif du pays ! encore moins un marchepied pour réussir sa vie ! Ils ont toujours donné l’impression d’avoir tout oublié et tout pardonné, tant ils ont mis un tonus hors du commun à construire leurs destinées et leurs foyers respectifs avec une assurance exemplaire. Même si leurs cheminements ont divergé au fil des années, Ali et Omar bossent depuis leur adolescence ! Autant que ma mémoire ne me fasse pas défaut, je ne me souviens pas avoir vu Ali, petit commerçant de quartier, se reposer une seule journée, y compris les week-ends, ni du temps du dimanche ni depuis celui de vendredi ! Quant à Omar, il a tenté l’aventure de l’émigration vers la France, où il a commercé et réussi aussi, quelques années après le départ des roumis !

Faut-il d’autres dépositions, d’autres témoignages que ce bref résumé, pour appréhender le drame et la souffrance endurée par nos deux comparses ? Comment ne pas s’étonner du fait que Ali et Omar n’ont jamais été reconnus victimes de guerre ni par la France, ni par l’Algérie pour être dédommagés en conséquence ?

En Algérie, ceux qui se sont rués sur le butin et bénéficié de pensions diverses au lendemain de « l’indépendance » sont connus et identifiés. Entre les vrais et les faux Moudjahidines, il n’y a pas vraiment de ligne de démarcation claire et précise. Mais il est utile, à titre de comparaison avec le drame précédent, de révéler un exemple typique de filouterie pour jauger de la dimension perverse et de l’immoralité impliquée dans la distribution des dédommagements et du partage du butin.

Nous sommes toujours en 1959-1960, juste avant l’installation du poste avancé des soldats gaulois. Par une soirée tranquille, juste après le diner; en préparation d’un coup contre ces derniers, un groupe de fellagas s’aventure pour une petite incursion au village. Pour activer leur mission, ils mobilisent quelques adultes, encouragés et forcés à se déclarer « volontaires » en allant les solliciter chez eux. Parmi eux, un oncle qui venait tout juste de débarquer d’Alger et à qui on refile un pistolet. Quelques foulées et quelques randonnées plus tard, RAS, pas de coup pour ce soir, tout le monde rentre chez soi, armes récupérées par les fellagas, au bout d’un quart ou d’une demi-heure, tout au plus ! Tremblotant de peur mon oncle rentre aussi. Ce fut son seul et unique « acte héroïque révolutionnaire » : tenir un pistolet et en trembler toute une soirée. Figurez-vous que quelques années après l’indépendance, grâce à 2 témoins présents avec lui, ce soir-là, il a eu le culot de réclamer le titre d’ancien moudjahid ! Titre qu’il a obtenu et grâce auquel il a fait fructifier ses avoirs pour en remplir autant d’armoires, et peut-être bien plus, que celles de notre illustre commandant Azzedine national !

L’opportunisme outrancier des uns a englouti et envasé les souffrances et les drames vécus par les autres pour les faire tomber dans l’oubli. C’est sur cet opportunisme généralisé que le clan au pouvoir a construit et continue de construire le pays, mandat après mandat, traficotage sur trafique d’une présidentielle conforme à l’exemple de cet oncle qui, la peur au ventre, n’a fait qu’affleurer, un pistolet par un joli soir de mai, pour ensuite postuler au titre supérieur d’ancien Moudjahid et revendiquer une gloire qui donne accès à des privilèges, des droits et du pouvoir à s’en faire pousser des ailes aussi fabuleuses que celles du cheval ailé de Mahomet .

D’ailleurs, n’est-ce pas au nom de cet opportunisme outrancier que son excellentissime Bouteflika, a été reconnu premier Moudjahid du pays ? Mais qu’a-t-il à nous montrer comme séquelles au cœur et au corps qui démontrerait quelconque engagement sur le terrain de la sale guerre où tant de héros sont morts ? Ali et Omar sont maculés à jamais par des brulures indélébiles au corps, et certainement autant d’invisibles à l’âme !

Quant à maman la France, comme nous la surnommons, dans un mélange d’affection incertaine et de sarcasme puérile, comment peut-elle justifier le fait d’avoir négligé ces petites victimes, abandonnées à leur sort, l’empreinte de la douleur clouée à l’âme et étalée sur le corps ? N’aurait-elle pas dû les prendre en charge comme ses propres enfants, du simple fait que, rappelons-nous, jusqu’au 4 juillet 1962, nos ancêtres étaient encore gaulois, et que les ennemis déclarés de la mère patrie c’étaient juste quelques groupuscules de fellagas égarés ?

Sous quelque angle d’analyse que ce soit, au finish, on est toujours amené à conclure que les comptes et les décomptes concernant les drames liés à la guerre d’Algérie ne sont pas terminés. On est loin du solde de tout compte ! Chacun peut s’en estimer victime, et les victimes se comptent par millions ! Quand on est adulte, il est souvent question de bon ou de mauvais choix, qu’il faut à un moment ou un autre assumer, en son âme et conscience. Les militaires gaulois ont assumé le leur, les harkis ont assumé leur part, les vrais et faux moudjahidin les leurs, le Général « Colombey les 2 mosquées » le sien, même si au problème Algérie « wa Allahou a3llam »  De-Gaulle n’a jamais rien compris. Qui a raison, qui a tort dans ces folies de guéguerres meurtrières ? Il ne s’agit pas, plus d’un-demi-siècle après, de questions collectives inconciliables mais de démarches intellectuelles individuelles. Il doit y avoir du bonheur et du malheur impossible à jauger de part et d’autre !  Quoique, à voir le sourire servi par Leila Kaddour chaque week-end sur France 2, comparé à la mine éteinte de nos speakerines télés recrutées sur la base du taux de vénération qu’elles portent envers le clan Aek-ElMali, il n’est pas difficile de se faire une petite idée qui ne diverge pas trop de la réalité. Que chacun la fasse, en son for intérieur, pour ne rien remuer de collectif qui fasse ressurgir les souvenirs d’un conflit douloureux, comme le sont tous les autres conflits sur terre, où des minorités audacieuses se sont déchainées et se déchaînent toujours sur des majorités silencieuses sous l’œil désobligeant et inhumain de ceux qui sont aux commandes de l’avenir du monde.

Cependant, quel type de mauvais choix peut-on faire endosser à un enfant de 10 ans pour qu’une grenade lui explose à la gueule, lui fasse traverser un état où la mort se dispute la vie pendant plus d’un mois, et que personne ne lui confère le statut de victime, ni d’un côté ni de l’autre des deux rives de la méditerranée ?

S’il subsiste encore des points litigieux sur lesquels il est bien plus important de se pencher pour y rapidement remédier, il s’agit bien de ces enfants qui portent en eux des blessures de guerre indélébiles, à l’image de celles marquées sur les corps d’Ali et Omar, sans que qui que ce soit ne se soit jamais soucié de leurs sorts. La reconnaissance est d’autant plus urgente que nos deux comparses sont maintenant grands-pères, retraité pour l’un, encore actif pour l’autre. Ce ne serait que réparation et obligation méritée pour ces victimes que d’être considérées bien plus que des dommages collatéraux d’une guerre qui pouvait être évitée, avec des « si seulement et seulement si » à charge pour une France, majeure supposée à l’époque des faits. Mais cela est encore une autre histoire, que l’on contera peut-être plus tard !

Les hommes se battent toujours pour des causes justes, semble-t-il ! Les injustes c’est comme l’enfer, c’est les autres, n’est-ce pas ? Mais qui parmi nous pourrait se vanter d’être doté de la dose de maturité, de la distance, du recul, de l’impartialité nécessaires dans l’absolu pour distinguer le voisinage du juste milieu entre le Juste et l’Injuste dans ces cafouillages d’inimitiés jamais faciles à mesurer ? À l’opposé, concernant Omar et Ali, qui parmi les belligérants de 1954-1962 oserait leur faire endosser quelconque responsabilité dans le cauchemar qu’ils ont vécu ?  Leur reconnaître le statut de victimes ignorées de tous, à dédommager au plus vite par tous, est non seulement à espérer, mais à en exiger l’urgence et la nécessité ! Par ailleurs, au-delà de dédommagements concernant les préjudices physiques, si de quelconques excuses se devaient d’être formulées concernant la guerre et ses nombreux atteintes morales, elles se doivent d’être directement présentées aux nombreux Ali et Omar encore en vie, et non pas au groupe de vieillards qui gouvernent le pays par la police et la trique, lesquels s’empresseraient de l’exhiber comme ultime trophée rajouté à leurs indénombrables fourberies !

Pour une paire d’Ali et de Omar encore vivants pour témoigner et exposer leurs blessures au corps, combien d’autres sont déjà partis et enterrés sans avoir pu savourer le moindre instant de reconnaissance à leurs souffrances ? Pour ces morts, c’est trop tard, mais un geste envers les vivants est plus qu’urgent !

Même si, à entendre le jeune Emmanuel Macron, la guerre d’Algérie ne concerne pas les hommes et les femmes de sa pétulante génération, personne n’a le droit de botter en touche le drame de ces enfants encore vivants. Et si, toujours selon Monsieur le président, tout cela est du ressort de l’Histoire ancienne qui appartiendrait désormais aux livres et aux musées, et jamais plus un sujet qui s’inviterait à la conscience de l’Elysée, que faire pour effacer ces traces encore béantes sur la peau des survivants de la sale guerre, ces enfants innocents quasiment déchiquetés à un âge où tout comme les galopins de leur génération, ils jouaient gaiement aux billes, au cerceau et aux sauts de moutons ? Comment peut-on prétendre régler le solde de tout compte entre l’Algérie et la France en ne rendant pas hommage à ces victimes oubliées de tous depuis plus de 50 ans ? Comment rechigner sur le fait de les dédommager pendant les dernières années du décompte de leurs vies, eux qui ont vu défiler, bon an mal an, tant de printemps et d’étés accordés sur les mêmes blessures marquées à jamais sur les cellules de leurs peaux et dans chaque lobe de leurs cerveaux ? Expliquez-nous donc tout cela, vous qui avez tout compris de la vie, oh Jupiter Macron !

Oui, entre l’Algérie et la France, il est temps de tourner la page, de tout oublier ! car tout peut s’oublier, même les plus coriaces des conflits et des malentendus ! et je crois pouvoir affirmer qu’il ne subsiste dans le cœur de la majorité des algériens aucune trace, ou si peu, de rancœur ou d’inimité envers leurs anciens colons ! En termes d’hostilité, les nouveaux seigneurs des frontières ont réussi le pari de tout récolter ! Mais comment peut-on demander à Ali et Omar d’oublier ces blessures visibles sur leurs peaux depuis leurs 10 ans, si on leur refuse le statut de victimes d’une bêtise humaine assumée et consommée entre adultes consentants ; eux les enfants pétillants à qui on a appris dès les bourgeons de leurs fureurs de vivre et de soif d’apprendre, à leur première année de scolarité, que leurs ancêtres étaient…bel et bien gaulois, et non pas…mecquois ?

Auteur
Kacem Madani

 




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