18 avril 2024
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Comment asseoir l’économie de marché sociale et la démocratie en Algérie

Projet économique 2020

Comment asseoir l’économie de marché sociale et la démocratie en Algérie

Cette présente analyse est une synthèse de l’ouvrage collectif que j’ai eu l’honneur de diriger paru en 2005 (1) toujours d’une brulante actualité, que certains experts organiques aux ordres et responsables qui affirmaient tout le contraire, redécouvrent seulement aujourd’hui Elle reprend sans aucune modification, l’intégralité d’une communication à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) parue le 08 octobre 2005, sur la bonne gouvernance et les réformes en Algérie(1).

1.-Un développement durable sous-tend trois conditions fondamentales, renvoyant à d’autres sphères que l’économique car toute analyse déterministe est vouée à l’échec, incapable de rendre compte de la complexité de l’évolution historique de la société algérienne :

La première condition est la paix sociale qui implique la mise en place d’un minimum de Smig social où les différentes sensibilités puissent dialoguer dans un cadre organisé se fondant sur la tolérance et le droit à la différence. L’objectif assigné est la réalisation d’un contrat social dont j’ai esquissé les contours en 1993 (1) qui ne saurait se limiter à certains segments de la rente (opérateurs- syndicat corporatiste), qui permettra la définition d’objectifs clairs tenant compte des impacts de la mondialisation- rapport social complexe- tant dans le domaine politique- militaire, social, culturel et économique, seule condition de la relance de la machine économique

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La seconde condition, est d’ordre politique affichant une nette volonté politique d’aller vers une économie de marché à finalité sociale , renvoyant au droit de propriété, et ce afin de nous adapter aux nouvelles mutations mondiales et ce par un désengagement progressif de l’Etat dans sa fonction de gestion pour devenir le lieu de la régulation économique, et sociale d’ensemble, d’orientation par la conciliation des coûts sociaux et privés, les relations de clientèles devant faire place à des rapports transparents, (le respect du contrat).

La troisième condition, implique une moralisation profonde de la vie politique, des discours de vérité, la communication étant fondamentale d’où l’importance des médias.

En fin de parcours l’objectif stratégique est que durant cette période de transition, il s’agit d’aller vers un véritable processus démocratique, se fondant sur une société plurielle plus participative des partis politiques crédibles, permettant la responsabilisation pleine et entière de l’ensemble de la société civile signe évident de la vitalité de toute société, conciliant la modernité et la préservation de notre authenticité. Car à la lumière des différentes expériences historiques, il y a urgence d’opter, pour le réalisme en matière de politique économique. La léthargie, l’activisme et le populisme signe de l’immobilisme sont intolérables.

2.-Le nouveau projet de société économique que j’ai proposé déjà en 1995, puis en 2005, devra s’articuler sur le nouveau rôle de l’Etat dans la conciliation de l’efficacité économique et son devoir d’équité sociale s’est articulé autour de huit axes directeurs :

Il faut asseoir la bonne gouvernance en Algérie, dont le pilier devra reposer sur une nouvelle gestion des ressources humaines, (évitant l’exode des cerveaux véritable hémorragie, l’élite étant le pivot de tout processus de développement) et continuer l’effort de stabilisation macro- économique pour atténuer le processus inflationniste en réduisant le déficit budgétaire et le ratio de la dette publique brute par une nouvelle politique des subventions qui doivent être ciblées.

Deuxièmement, la nouvelle politique économique devra s’inscrire, comme je l’ai démontré dans plusieurs contributions internationales , dans le cadre de l’espace Europe‑Maghreb et plus globalement de l’espace économique Méditerranée/ Afrique impliquant une coordination des politiques économiques basée sur l’encouragement de l’investissement direct, du partenariat(encore qu’il faille préciser cette notion vague) et de la libération de toute les énergies créatrices dans le cadre des investissements basés sur les avantages comparatifs tenant compte des mutations accélérées de l’économie mondiale à, travers la stratégie tripolaire des grands espaces mondiaux :Alena-Apec-Europe.

Troisièmement, la nouvelle politique économique devra être donc caractérisée par l’adaptation à l’universalisation de l’économie de marché, tenant compte des spécificités sociales, où la dominance est le consommateur et l’arbitre, les marchés financiers. Le véritable nationalisme se mesurera par la capacité des Algériens d’améliorer leur niveau de vie grâce à leur contribution à la valeur ajoutée mondiale.

Quatrièmement, est d’éviter les politiques industrielles globales, dépassées et d’imaginer une nouvelle politique non de l’industrie globale ,mais de l’entreprise non calquée sur les anciennes organisations hiérarchiques bureaucratiques mais sur la souplesse des organisations basées sur la décentralisation des décisions économiques, la gestion prévisionnelle des compétences, le travail en groupes tenant compte des nouvelles technologies On ne crée pas d’emplois par des discours ou des actes administratifs mais la création d’emplois pour lutter contre le chômage est l’œuvre d’entreprises supposant la levée des contraintes d’environnement dont la responsabilité est celle de l’Etat .

Cinquièmement, muter progressivement les services, qui deviennent de plus en plus créateur de valeur ajoutée (éducation, santé. télécommunication, transport, infrastructure) en introduisant les paramètres marchands pour tester de leur efficacité, tout en encourageant la mixité pour améliorer les prestations fournies aux consommateurs. C’est la caractéristique des économies en cette ère du XXI e siècle.

Sixièmement, coordonnée avec les précédentes concerne , cela concerne la réforme du système financier dont les banques, ( cœur des réformes), la dynamisation de la bourse des valeurs, ( évitant ce paradoxe d’une bourse étatique qui n’existe nulle part de par le ponde) la débureaucratisation de la douane, fiscalité, administration, dynamiser d’une manière cohérente et selon la plus totale transparence pour susciter l ‘adhésion , les participations et la privatisation par la création d’une agence des privatisations (un Ministère ne pouvant être juge et partie afin d’éviter les délits d ’initiés). L’objectif est d’éviter les actions sectorielles désordonnées en privilégiant la concertation sociale(3).

Septièmement, le nouveau projet de société économique devra être marqué par une profonde réorganisation institutionnelle par une réelle décentralisation autour de pôles régionaux et la création de grands Ministères surtout ceux de l’économie et d e l’éducation , avec des Secrétaires d’Etat techniques .Ce sera le noyau de la rupture systémique pour l’instauration d’une économie concurrentielle , loin de tout monopole qu’il soit de type public ou privé. Ce qui impliquera de nouvelles structures, de nouveaux comportements, de nouveaux hommes convaincus par cette nouvelle politique. Durant cette phase de transition, l’avis d’appel d’offres pour les postes de responsabilités devrait être ouvert pour les walis, les directeurs généraux d’entreprises publiques responsables du destin de leur organisation.

Huitièmement, le nouveau projet de société économique devra être caractérisé par l’action de l’État à travers son devoir d’équité sociale. La philosophie de base qui devra soutenir ce projet est cette devise: ni dirigisme, ni libéralisme absolu.

3- L’intervention de l’Etat se manifestera dans la pratique par rapport à six éléments fondamentaux

Premièrement, soutenir le développement des infrastructures par une administration rénovée.

Deuxièmement, réduire les inégalités sociales.

Troisièmement, améliorer le fonctionnement des marchés et des initiatives par une politique incitative d’encadrement macro-économique et macro-social favorisant les espaces de libertés c’est à dire les espaces concurrentiels sociaux, politiques et économiques rentrant dans le cadre du nouvel espace Monde. L’Etat n’oblige pas mais incite, mobilise par l’élaboration d’objectifs, cohérents et concertés pour optimaliser l’efficience globale.

Quatrièmement, élaborer une nouvelle politique de l’emploi caractérisé non pas par des distributions de revenus sans contreparties productives mais devant accroître la flexibilité du marché du travail par une formation permanente. Cela doit toucher également l’administration et les services collectifs. Il y a lieu d’éviter les classifications dépassées emplois productifs, non productifs, et de définir une nouvelle nomenclature qui s’adapte à l’éclosion des producteurs de symboles au niveau de l’économie mondiale.

Cinquièmement, s’impose une nouvelle politique de la sécurité sociale si l’on veut éviter l’implosion, en cas de chute brutale des recettes des hydrocarbures, des actuelles caisses de retraite, ce qui demande de l’imagination avec la baisse de salarisation et des baisses de cotisations. Les recettes exceptionnelles des hydrocarbures ces dernières années devraient aider à cette phase d’ajustement structurel. Il s’agit de combiner la méthode de l’indexation et la méthode d’incitation parallèlement à l’incitation par capitalisation en intégrant la sphère informelle, produit de la bureaucratie et du trop d’Etat, par des mesures socio-économiques loin de toute action coercitive.

Sixièmement, facteur stratégique d’équité sociale, revoir le système fiscal par la combinaison de l’équité verticale (augmenter le taux d’imposition en fonction de l’accroissement du revenu) et l’équité horizontale (impôt égal‑ revenu égal) mais en n’oubliant jamais que l’impôt peut tuer l’impôt.

En conclusion, les propos que l’on a attribués récemment au premier ministre et largement reproduits par la presse nationale et internationale de « faillite de l’Algérie » a rendu pessimiste les investisseurs tant nationaux qu’étrangers vis-à-vis de l’avenir du pays. Cette déclaration d’une extrême gravité a porté un large préjudice au pays tant au niveau international que national avec le risque de créer un important malaise social et donc de favoriser le blocage des réformes alors que le pays a besoin de paix et de sérénité. Il y a lieu d’éviter de verser gratuitement dans la sinistrose. Je suis confiant en les potentialités de l’Algérie pour relever les défis du nouvel millénaire. L’insertion harmonieuse de notre pays dans le concert des Nations , avec la nécessaire ouverture sur la modernité tout en préservant notre authenticité , dynamisera l ‘investissement utile à moyen et long terme et donc permettra de créer des dizaines de milliers d’emplois loin des aléas des intérêts de la rente. Car le désengagement de l’Etat de la sphère économique et de certains segments des services collectifs partiellement ne saurait signifier la fin du rôle de l’Etat. Mais c’est la garantie de la démocratie économique, sociale et politique solidaires, donc de sa moralité et de l’Etat de droit. C’est le fondement pour asseoir progressivement l’efficacité, l’équité en un mot l’économie de marché concurrentielle et la démocratie (1).

A. M.

Références

(1)-Conférence du professeur Abderrahme Mebtoul disponible Recueil des Conférences diplomatiques (Volume IV 1° semestre 1995 Ministère des Affaires Etrangères-Alger). Cette intervention au siège du Ministère des Affaires Etrangères a fait l’objet d’une intervention du même auteur au niveau du colloque mondial tenu à l’UNESCO (Paris ‑France) à l’occasion de la fondation de l’association Afrique ‑ Europe, en 1995.

-Article du Docteur Abderrahmane Mebtoul, El Watan spécial Economie – septembre 2005 et novembre 2015 quotidien d’Oran « réformes et place de l’Algérie et du Maghreb dans la stratégie euro-méditerranéenne »

Lecture at Picardie (France) University. International Conference of Amiens in the occasion of the year of Algeria in France, October 16-17, 2003. International Dynamics and Privatisation in Algeria (intervention sur la stratégie des réformes en Algérie lors de l’année de l’Algérie en France).

– Docteur Mebtoul « L’Algérie face aux enjeux de la mondialisation :bonne gouvernance- démocratie- ,économie de marché » ouvrage paru simultanément en arabe-anglais-français ( 140 pages chaque volume) édition Dar El Gharb 2004 avec la contribution exclusive de l’expert de renommée mondiale le Docteur Hernando De Soto sur « sphère informelle et construction de l’Etat de Droit en Algérie »

Auteur
Abderrahmane Mebtoul, professeur d’universités

 




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