26 avril 2024
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La Dissidence algérienne face au Système des urnes

DECRYPTAGE

La Dissidence algérienne face au Système des urnes

Les millions d’Algériens du mouvement de la dissidence citoyenne du 22 février ont réussi en moins de trois mois à fissurer le système du pouvoir dont le noyau dur s’est solidifié dans l’hégémonie, l’illégitimité, la fausseté et l’incompétence depuis 1962 par des urnes trafiquées dans leurs transparences même.

Tout ce qu’entreprennent les acteurs éphémères du système à bout de souffle se situe en aval de la pression de la dissidence citoyenne dont il cherche à affaiblir, tronquer, diluer, rendre disparate l’unique revendication de ses marches : l’exigence du départ du système, de tous ses acteurs.

Les Algériens l’ont mis à nu et que ne voit-on pas comme spectacles désolants ! Tandis que le mouvement de la dissidence maintient le cap, réitère, chaque vendredi sa quérulence révolutionnaire, jamais formulée avant autant d’abnégation dans l’Algérie de la post-indépendance, le pouvoir en place  n’a qu’une obsession : comment maintenir le cap et arriver, coûte que coûte, aux échéances des élections présidentielles du 4 juillet prochain. Sa seule bouée de sauvetage.

Toutes ses agitations, ses appels désespérés à un dialogue de toutes les duperies et faussetés, ses dithyrambes mielleuse en surface, fielleuses dans ses fonds  à l’adresse du « pacifisme » du peuple et même sa reconnaissance hypocrite pour un » changement radical » par le recours au respect de la constitution et de ses articles de crise, n’a qu’un seul but, le seul, l’unique avant le peuple, sans le peuple, contre le peuple, comme il l’a démontré au cours des péripéties de l’histoire de l’indépendance du pays: le rendez-vous électoral, électoraliste du 4 juillet prochain.

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Pour le pouvoir en place, c’est inédit dans ses mœurs et dans ses stratégies de blanchiment d’argent, de redistribution, repartage de rentes intra et inter claniques qui le composent que le moyen moderne du suffrage universel qu’il détourne et utilise à ces manœuvres mafieuses lui échappe et s’éloigne à mesure qu’il s’en approche. C’est la raison pour laquelle l’une des priorités des mesures énoncées dans les tout premiers discours du vice-ministre de la Défense nationale, Ahmed Gaïd Salah, est, en tant que chef d’Etat-major de l’ANP, d’«accompagner » le scrutin présidentiel et de proclamer solennellement d’en être le garant de la « transparence ».

C’est que la grande déroute du pouvoir a été d’abord déclenchée par les effets indirects du mouvement de la dissidence citoyenne qui, après avoir contraint Bouteflika à renoncer à son cinquième mandat puis à la prolongation déguisée de son 4ème, a, du même coup, par ces deux abandons, – à un mandat en cours et à celui initialement préparé avant qu’il ne brigue le 4e   – ,  appelé au départ de tout le système hors des pistes traditionnelles de sa régénérescence de ses trafics entre ses décollages et atterrissages : ses rendez-vous électoralistes.  

En vérité, ce n’est pas le départ forcé de Bouteflika qui a fait vaciller le système et ses clans bien implanté et puissants y compris au sein de la Justice qui se refait in extremis une virginité pour « un mariage de jouissance » avec le peuple, mais  ce qu’il symbolise comme pérennité d’un système, du leur, qui fait haro sur la constitution pour enchaîner d’affilée une série de mandats présidentiels, et pour, en définitive, une mandature à vie.

Le mouvement de la dissidence citoyenne par cette revendication principielle appelant à « dégager le système » n’appelle pas répétons-le à châtier les pseudo-pillards des richesses du pays, les fantomatiques voleurs de l’argent du peuple, ne veut pas des autoproclamés messies de mauvais aloi du système, redresseurs de torts trop zélés pour être sincères et dévoués, mais  la mise à mort symbolique d’un système et des moyens institutionnels et constitutionnels de sa reproduction sur le dos des Algériens, dont celui, par excellence : le scrutin présidentiel.

Ainsi, en chassant Bouteflika non pas seulement  de la gouvernance formelle et symbolique mais aussi et surtout du processus corrompu du rendez-vous de l’élection présidentielle qui s’annonçait pour lui, avant la déferlante de la dissidence, comme une main levée dans une APN faisant mine de « voter » une loi, la dissidence citoyenne du 22 février inaugure ainsi une nouvelle ère de l’Algérie indépendante. Elle refuse la tenue d’un scrutin présidentiel promis « transparent » et « propre » par un système opaque et sale dont il exige le départ.

Pour sauver ce rendez-vous de la dernière chance, dont dépend sa survie, le système est prêt à vendre son âme au diable comme il l’a fait du reste durant les quatre mandats de Bouteflika « accompagnés » par ses Généraux de Corps d’armée dont Gaïd Salah qui promet, présentement, que l’ANP sera garante des urnes du 4 juillet en raison « de ses racines novembristes de 54 » !

Dans cette course contre la montre, le pouvoir repousse l’échéance de l’urne présidentielle prévue initialement le 8 avril dernier au 4 juillet prochain , la veille de la commémoration du 57e anniversaire de la proclamation de l’Indépendance, pensant qu’à cette date butoir il allait par ses manœuvres politiciennes arriver à enjamber les yeux fermés, le pas sûr et la langue fourchue la grande déferlante du mouvement de la dissidence citoyenne, trente millions d’Algériennes et d’Algériens ( et toutes celles et ceux entrés en dissidence qui ne peuvent se déplacer aux marches ) qui se refusent à être électeurs ou à appeler aux urnes trafiquées d’avance et encerclées par le Képi.

Obnubilé par cette échéance électoraliste, la tenue de l’urne présidentielle pour le système se prépare « administrativement » – alors même que ses appels au dialogue restent vains et sa conférence nationale en vue d’en trouver les instruments est mort-née. Donc, les intérims d’un système n’hésitent même plus à brûler la « phase de transition » pour ne surtout pas rater celle de la phase décisive du 4 juillet. Abdelkader Bensalah, le chef de l’Etat  du 102 a bien dit, avec fermeté et arrogance, suite à son échec essuyé à ses différents appels au dialogue vénéneux que « Les élections auront lieu à la date prévue » ! Certes, le système, quand il s’agit de rendez-vous électoralistes comme celui de l’urne présidentielle, tient, comme à la prunelle de ses yeux au regard torve, à ses promesses car elles sont à son intérêt, de ses clans.

Partant de cette logique du lien tenace entre la logique rentière du système et l’équipage électoraliste qui la reproduit, le bulletin de vote détourné de son assise démocratique et moderne pour servir des intérêts de castes et de gouvernances primitives, il ne serait pas exclu que le vice-ministre de la Défense nationale Ahmed Gaïd Salah qui fait fi de ce que décide ou non son chef de l’Etat par intérim décide de reporter pour la troisième fois à une date ultérieure le scrutin présidentiel, sachant que, de toutes les façons, la crise politique a atteint sa gravité avec ou sans président de la République qui, même élu clandestinement par un système qui s’accroche au pouvoir ne ferait qu’envenimer la situation et serait pousser à la sortie, au même « Dégage » avant même d’entamer sa mandature. Mais les candidats, avertis de cette injonction salutaire pour le pays,  se font rares sur le patio du scrutin. Ces rares prétendants, les informations officielles les qualifient d’ « indépendants » ; Bouteflika se présentait ainsi d’un mandat à l’autre.

Le mouvement de la contestation du 22 Février a jusque-là su, avec brio, déjouer toutes les ruses du pouvoir dans ses tentatives de  lui vendre les fruits d’un dialogue mortel et qu’il lui serve ainsi d’ alibi démocratique, républicain d’une nouvelle Algérie à un scrutin présidentiel par lequel le système se lèche déjà les babines, sur le dos du mouvement de la contestation, avec sa prétendue duplicité révolutionnaire, pour un 5e mandat,  sauvant ainsi la mise de celui qui est parti mais sans emporter avec lui la poule aux œufs d’or ! Mais cette fois, c’était sans compter la déferlante de la dissidence citoyenne qui ne veut ni de sa justice ni de ses urnes mais, juste qu’il ferme définitivement ses boîtes et sorte !

Auteur
Rachid Mokhtari, écrivain journaliste

 




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