29 mars 2024
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« La reddition de l’hiver » de Kamel Bencheikh, des nouvelles gorgées de poésie

PUBLICATION

« La reddition de l’hiver » de Kamel Bencheikh, des nouvelles gorgées de poésie

« Un grand frémissement d’ombre supplante le poudroiement de lumière. Et soudain, c’est le silence qui émerge, le silence qui submerge, qui envahit le siècle, un silence sans trêve qui semble se répandre au-delà du globe terrestre, un silence qui envahit l’immensité et la marge. »

Ces quelques lignes extraites de L’enchantement, la nouvelle qui ouvre La reddition de l’hiver, le recueil de nouvelles que Kamel Bencheikh vient de publier aux éditions Frantz Fanon, nous démontre, si besoin est, qu’il est d’abord et avant tout, le grand poète que nous avons toujours connu.

Nous savons tous qu’un poète, quelle que soit la forme que prennent ses dires, ne peut jamais quitter les rivages tempétueux de la poésie. Il est tout simplement logique d’attendre de trouver de la poésie chez un poète. Bien évidemment qu’il y a mille et une manières de faire entendre sa voix et de travailler sur l’architecture des textes. Chez Kamel Bencheikh, c’est la cadence et la beauté qui priment. Et sa poésie touche à l’universel.

La reddition de l’hiver est composé de seize nouvelles dont la facture et la longueur sont diverses. Les sujets abordés sont les éternels thèmes de ceux qui veulent échanger avec leurs semblables sur des thématiques qui touchent à l’essentiel. «Lettre à Ilyana et à Alyna » est une invite, de la part d’un grand-père à ses petites-filles, à s’ouvrir sur les grandes aventures humaines en pointant l’index sur des citations de Léon Tolstoï, comme celle-ci par exemple : « Pour parvenir à la connaissance de soi et de sa relation à l’univers, l’homme n’a que la raison ». Comme il est bon de rappeler une telle évidence dans un monde où les croyances deviennent la norme.

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La nouvelle qui ferme la marche est un rejet sans concession de tous les obscurantismes et une dédicace aux amis (Tahar Djaout, Youssef Sebti…) qui ont été assassinés durant les années noires algériennes. « Les abominables hommes de l’Atlas — les « Yétis » nord-africains — s’abattirent sur l’Algérie avec la bouche pleine de mensonges, les yeux remplis de haine, les mains chargées d’ignominie et la peau couverte d’infamie. Et leurs visages étaient ceux des hommes. Et au nom de leur philosophie doctrinaire, ils dirent que l’ordre était d’éliminer la paix de cette terre, de brûler les livres et les bibliothèques et d’éterniser l’exploitation de la femme par l’homme. » Dans cette nouvelle comme dans tout le recueil, c’est le militant de l’universalisme qui avance à visage découvert.

De l’engagement, du talent, de la poésie, voilà un ouvrage où les textes disent la précision, dépouillés de mots superflus, où la force est présente du début à la fin. Ces nouvelles accueillent les êtres et les choses et établissent une hiérarchie en convoquant le parlement des vivants : l’amour, les voyages, le combat, l’égalité, l’enfance, l’apprentissage à travers l’expérience, l’éclat de la neige sur un arbre, l’attente de ceux que nous aimons… Nous y détectons la douleur de vivre ainsi que les pulsations de la vie battante – et une connaissance pénétrante de notre si éphémère destinée. 

La poésie est partout dans ce recueil. C’est d’abord à une écriture originale au sommet de l’art à laquelle nous sommes conviés. Chaque nouvelle a son caractère propre et son thème particulier mais toutes se font écho dans une même unité d’atmosphère. C’est à la richesse que nous accumulons pendant la lecture que nous prenons conscience de la valeur d’un ouvrage. Et La reddition de l’hiver de Kamel Bencheikh, une fois traversé le chemin de lecture, nous offre la certitude que le printemps est désormais devant nous.

De la grande littérature à lire et à vivre !

Auteur
Hamid Ali-Khodja

 




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