25 avril 2024
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Les incertitudes économiques et politiques s’accumulent sur l’Algérie

DECRYPTAGE

Les incertitudes économiques et politiques s’accumulent sur l’Algérie

Toute l’économie et la colonne vertébrale du pouvoir sont maintenus par la seule grâce du pétrole.

Le discours des pouvoirs publics, renouvelé à chaque fois, faisant part de la volonté de diversifier l’économie nationale pour échapper à la dépendance éternelle aux hydrocarbures a été battu en brèche, la réalité nous a rattrapé : le pétrole, après une embellie qui a duré quelques mois, replonge sans perspective cette fois d’une remontée spectaculaire, et quand bien même un tel miracle se produirait, d’autres facteurs font rétrécir d’année en année les volumes d’hydrocarbures exportés.

Les réserves de change fondent aussi à vue d’œil et seul le recours à la planche à billet a peut-être permis de faire reculer l’échéance d’une tempête dévastatrice.

Des déclarations contradictoires émaillent la scène médiatique, des propos scindés entre ceux qui affichent un optimisme factice, en dépit de cette menace économique qui est à nos portes, et ceux qui exposent un pessimisme, réellement, tangible.

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Les plus raisonnables prédisent au pays exportateur de pétrole que nous sommes, des années insupportables. Il en serait de même concernant beaucoup de pays producteurs qui ont besoin d’un cours de l’or noir élevé, pour financer leurs dépenses, a affirmé l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) dans son dernier rapport.

Notre pays, selon les mêmes experts, a besoin d’un baril de plus de 100 dollars pour maintenir ses équilibres budgétaires et préserver sa position financière extérieure, sérieusement fragilisée par la diminution des rentrées du pétrole et du gaz, lequel gaz est indexé au pétrole et à sa chute.

Pour assombrir le tableau et au rythme de la croissance actuelle de la consommation interne et à celui du faible renouvellement des réserves l’Algérie n’aura plus de Gaz à exporter en 2032. Et c’est le ministre de l’énergie qui l’affirme !

Le peuple s’attend, à l’orée de 2019, à des perspectives difficiles, d’autant plus qu’il se perd en conjonctures, malgré les sorties optimistes des ministres les plus en vue du gouvernement, et en l’absence d’une communication officielle du Premier ministre sur le sujet.

L’heure est grave, disent les plus pessimistes d’entre nous, mais c’est à l’Etat qu’il revient de prendre les mesures qui s’imposent et à Ahmed Ouyahia de parler et d’affranchir la population sur ce qui l’attend ; il doit le faire, pour rassurer les uns et les autres et leur dire, par exemple, qu’il est temps pour le pays « d’aller vers une économie de production, casser la dynamique rentière, c’est-à-dire libérer l’investissement et l’initiative de création d’entreprises et stopper, aussi, la tendance à l’informatisation de notre économie ».

L’informel a été chiffré à 6000 milliards de dinars ; il faut trouver le moyen de le taxer ! C’est une des solutions admises, à même de faire face à la réduction des recettes suite à la chute du baril de pétrole.

Ne pas collecter cet impôt, c’est rééditer l’exemple de la Grèce qui a payé cher son « laisser aller » en la matière.La Turquie, a réussi à s’extirper du poids du circuit de l’informel grâce à des mécanismes proactifs de recouvrement de l’impôt, des réformes macroéconomiques, notamment concernant les entreprises.

Des politiques à prendre en modèles, selon certains !

La chute du prix du pétrole n’est plus une vue de l’esprit, mais une réalité désormais présente et pressante. La crise affole médias et experts de tous bords. Tout le monde s’accorde à le dire, l’heure est grave. Déflation, récession, chômage accru et nouvelle tempête financière sur l’Algérie ne sont pas des menaces en l’air.

Pour sortir de cette situation, Karim Younès, l’ancien président de l’APN estimait qu’ «il est urgent de battre le rappel de toutes les intelligences pour dessiner la voie de l’Algérie du siècle en cours, et dresser l’inventaire des nouveaux défis. Il évoque, entre autres, les 40 000 cadres supérieurs exilés au Canada dans les années 1990 et tous ceux, partis bien avant la décennie rouge, fuyant la vindicte des cancres, accrochés aux postes de responsabilité ».

Il est grand temps, s’il n’est pas encore trop tard, d’activer le chantier d’une nouvelle perspective, de redéfinir une stratégie de développement du pays, de le projeter dans le monde pour y tisser des relations internationales, y faire reconnaître nos atouts potentiels, assumer notre part dans la coopération et le partenariat avec les pays de l’Afrique, avait ajouté l’ancien président de l’APN.

Moins optimiste, Abderrahmane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque centrale d’Algérie, avait pour sa part prédit : « si les pouvoirs publics ne changent pas de vision, l’Algérie ne pourra pas éviter le rééchelonnement, tout en mettant en exergue que le FMI n’est pas, comme on le croit, une institution financière mais plutôt un instrument de domination. Le FMI sert, selon lui, aux Etats-Unis à contrôler l’économie mondiale et soumettre les pays à sa volonté ».

Un autre expert, Abdelmalek Lamiri, pense que « les pouvoirs publics peuvent, d’ores et déjà, s’attaquer à cette menace qui ne dit pas son nom, à savoir les importations ; on ne peut pas continuer, dit-il, à subventionner les importations de costumes Pierre Cardin ou les Kiwis ! ». L’expert estime, par ailleurs, que les mesures prises par le gouvernement jusque-là sont isolées en ce sens qu’elles touchent, différemment les secteurs, alors que la solution passe par des décisions globales ; on ne peut pas, par exemple, développer l’agriculture si les autres départements ne suivent pas les subventions et les transferts sociaux à destination des couches défavorisées sont maintenus.

Tous ces débats, donnent le tournis au citoyen lambda, qui pense que « l’Etat, en fin de compte, ne dépense pas trop, au regard de tout ce qu’il a réalisé jusque-là, mais qu’il se fait voler ! » ; toutefois, il faut être, vraiment, de mauvaise foi pour ne pas reconnaître les énormes efforts déployés par l’Etat pour doter le pays en infrastructures de base, barrages hydrauliques, voies ferrées, routes, métros, tramways, logements etc !       

Dans le pays justement, quid du nouveau plan économique ou modèle de croissance ? Est-il encore en cours d’élaboration ?  

Ce plan qui date de l’époque d’Abdelmalek Sellal, avait entendu pour ambition, laissait-on entendre, de freiner le ralentissement de la croissance en ouvrant la voie à la diversification de l’économie nationale, dans un contexte, comme il a été rappelé supra, de chute drastique du prix du pétrole.

Il comptait sur l’investissement des énergies renouvelables, l’agro-industrie, les services, l’économie numérique et celle du savoir, l’industrie en aval des hydrocarbures, une amélioration du climat des affaires, une ouverture aux investissements privés et publics et la promotion des exportations hors hydrocarbures, note « Foreign Policy », un média américain.

Toutefois, sa mise en œuvre serait compromise ou entravée par une approche très bureaucratique et centralisée du développement économique et par un manque de transparence et de clarté.

De plus, l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers, avec notamment la règle 51/49 et l’impossibilité pour ces derniers de contrôler leurs projets et entreprises ajoutent à la difficulté.

Il y a quelque temps, rappelons-le, le « Fraser Institute » classait l’Algérie à la 151ème place sur 159 pays en matière de liberté économique, avec une marge de commerce à la 154ème position et un système légal au 6ème rang !

 La perspective d’une hausse du prix du baril de pétrole pourrait permettre d’espérer un sursis, ce qui laisserait du temps à l’Algérie pour réformer son économie sur la voie de la diversification, conclu Foreign Policy.      

Mais, mis à part le peuple qui, à la lecture notamment des journaux, s’inquiète de la chute du prix du pétrole, la sphère dirigeante manifeste une espèce d’indifférence, singulièrement, effrayante.                

Quelle sera désormais la stratégie pétrolière de notre pays ? Ira-t-il vers une intensification de l’exploration ? Ou misera-t-il alors, sur l’intensification de l’extraction du pétrole ?

Va-t-il opter, maintenant, pour la valorisation des hydrocarbures nationales à travers la pétrochimie ?

Ou continuera-t-il à vendre du pétrole brut pour importer, en définitive, de l’essence ?

Que fera-t-il aussi des énormes gisements de gaz de schiste qui dorment dans son sous sol ?

Certes le pays n’est pas endetté mais le fonds de régulation des recettes (FFR) a été épuisé en février dernier. Les réserves de change ont été divisées par deux en trois ans !

Pour tenter de financer la dette publique et éviter la cessation du versement des salaires et pensions, le gouvernement a eu recours à la planche à billets, une solution de facilité aux conséquences désastreuses, entrainant l’inflation et la dégradation du pouvoir d’achat des Algériens. Autant de questions que ne se posent pas, à l’évidence, ceux de l’opposition.

Ils se prétendent, pourtant, porteurs d’une alternative politique et d’un projet économique pour le pays. Mais, force est de constater, qu’ils en sont toujours aux constats et aux dénonciations des « dépassements » du pouvoir sans pour autant avancer des options et des perspectives de rechange.

Il faut admettre que la régression politique est telle en Algérie, qu’une erreur d’infographie sur un manuel scolaire a, en définitive, pris plus de place que les idées politiques dans le débat national, l’été durant !  

C’est tout de même curieux qu’à un mois de la convocation du corps électoral, rien ne laisse transparaître que nous sommes à la veille d’une élection présidentielle.

Les pratiques au sein des partis, y compris ceux de la mouvance démocratique, n’ont rien à envier à celles du pouvoir. Le populisme autoritaire règne au sein des partis comme au sein du pouvoir. En guise de multipartisme, on a fabriqué une multitude de partis « uniques ». On peut dire observait un homme politique que les partis sont absents parce qu’ils n’ont aucun rôle à jouer dans un système populiste, sauf à en devenir des auxiliaires et des soutiens.                        

Pourtant le pays, en ces moments difficiles, a besoin de toutes ses énergies y compris celles de l’opposition. Personne, d’ailleurs, n’imagine un  monde politique où tous se tiendraient tendrement, la main pour le plus grand bonheur possible. Ce serait ridicule et même malsain, car la démocratie, c’est aussi la bagarre et l’alternance.

Bouteflika va-t-il rempiler ?

Bien entendu, ce n’est pas facile, car cela revient, pour chaque camp, à brutaliser son aile la plus conservatrice. Il n’en reste pas moins que pour l’heure c’est l’incertitude totale sur les intentions du président de la République désespérément muet : va-t-il rempiler comme vient de l’annoncer le patron de l’UGTA et de ce fait éliminer tous les candidats du système ? ou renoncer au 5éme mandat et ouvrir « tout grand » les portes d’El Mouradia à un candidat qu’il aura lui-même adoubé ?

Cela fait maintenant neuf mois que l’idée d’un cinquième mandat fait parler, sans que l’on sache vraiment s’il s’agit d’une option inéluctable ou d’un vœu rendu impossible par la santé du président!

Certes il y a l’option du report ou le maintien de la présidentielle d’avril 2019  qui a peut- être été tranchée lors de la réunion cruciale qui s’est tenue à la résidence de la République de Zeralda, à Alger, et à laquelle ont participé tous les partis politiques de l’Alliance présidentielle, dont Moad Bouchareb du FLN, le Premier ministre Ahmed Ouyahia du RND, Amara Benyounès, secrétaire général du Mouvement populaire algérien.

Sans oublier Amar Ghoul, le président du TAJ, un minuscule parti politique devenu important depuis que son patron a fait sienne (volé?) l’idée du «report» de la présidentielle lancée par Abderrazak Makri, du MSP qui,depuis, n’en finit pas de maugréer !

Ces tenants du «statu quo» tiennent à justifier celui-ci par la refonte en profondeur de la Constitution algérienne qui nécessitera « une conférence nationale» et «une transition politique» qui débouchera inéluctablement sur un report de la présidentielle et donc le maintien d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence pour quelques années, comme le souhaitent ses partisans.

Le chef de l’Etat vient de présider un conseil des ministres sans pour autant dévoiler ses intentions, ajoutant ainsi une couche d’incertitudes sur ce qui nous attend en ce début d’année 2019.

Auteur
Cherif Ali

 




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