1 mai 2024
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Merci l’artiste, merci Idir

HOMMAGE

Merci l’artiste, merci Idir

Fidèle auditeur d’Idir, notre contribution à cet hommage ne s’appuie que sur notre modeste connaissance de ses textes et de sa poésie.

Je n’ai eu qu’une fois l’occasion d’échanger brièvement avec lui. C’était en 1987. Il donnait un concert dans les Yvelines.  Je suis allé le voir et je fus introduit pas son guitariste et fidèle ami Tarik que je connaissais. Nous avons discuté de la question identitaire à laquelle je consacrais une partie importante de ma thèse. Il m’avait promis d’essayer de venir à ma soutenance à la demande des membres du jury. Mais ses obligations professionnelles ne lui ont pas permis d’être là.

Aussi, c’est avec humilité et simplicité que je veux contribuer à lui rendre un hommage à sa personne, et à son ses chansons qui ont bercé ma jeunesse et bercé l’enfance de mes enfants. 

Salem Chaker, dans un hommage* à Da L’Mouloud Mammeri, écrivait ceci après son décès tragique dans un accident de la route en ce 25 février 1989 : «Ce qui était mortel en lui nous a quittés, comme le veut certes une loi de la nature. Mais à partir de ce moment, il reste présent dans notre être essentiel et impérissable. Présent par le rayonnement d’une œuvre écrite majeure, présent dans l’obscure lumière d’une vie de héros sans ostentation. Tant que l’Algérie qu’il a contribué à faire, vivra, il vivra nous aurons toujours besoin de lui à nos côtés. Il vivra, il ne manquera pas de répondre à notre appel. Pour l’instant, il rêve merveilleusement, il ne sort pas de son rêve. » 

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Et bien Idir  est et sera toujours là, parmi nous. Depuis ce samedi 2 mai, il est et sera éternellement présent en chacun d’entre nous grands et petits, éternellement présent dans chaque empan de la montagne kabyle Derdjer dont il dit ceci :  

lemmer heddern idurar
tilli agh d innin
ayyen ccfan
ayyen yellan d lesrar
d w ayyen gh fren ussan
agh d innin ar d innin
agh d innin af ayyen I aadan

ay adrar negh aalayen
a win yesbern I zzman
tighaltin ik s ideflawen
yernan tafa n itran
innid innid ma sghurek id nefruri
innid ghas innid
nebgha nszer d acu yellan

ay adrar negh aalayen
nebgha ad agh d innid
ayyen ur neszri
ayyen êhkan d w ayyen nnan
mkul wa amek ara ‘ d inni
ghas innid ma d arraw ik
negh wissen ma neghlid seg iggeni

innid innid ma sghurek id nefruri
innid ghas innid nebgha nszer d acu yellan 

Idir est présent, il est et sera dans le moindre caillou, le moindre ruisseau et dans le moindre coin de toute demeure kabyle. Il occupe l’espace artistique et culturel et son œuvre s’est inscrite dans l’universalité spatio-temporelle.  

Comme son ami Lwenas (Matoub), Idir sera toujours là, il sera présent et nous accompagnera à chaque instant, il sera là au détour de nos discussions,  il occupera nos esprits, son œuvre universelle parlera éternellement de et pour lui. Hier Idir n’est pas mort. Il est juste parti pour un voyage. Demain, après-demain, l’an prochain, il  demeurera vivant, bien vivant et bien parmi nous. 

Idir à travers son œuvre est au cœur du combat identitaire. Idir a chanté, chante et chantera encore à travers toute son œuvre et demain sans doute à travers la voix de Tanina sa fille, l’oiseau, symbole de liberté, de notre liberté d’amazigh. 

Dans « Izumal », Idir rend un vibrant hommage à tous les Hommes épris, comme lui  et comme ses ancêtres Amazigh de liberté, et qui croulent dans les prisons pour la seule et unique raison : avoir dit ce qu’ils pensaient et dénoncé tout haut toutes les formes d’injustice et d’oppression. 

Izumal                    Les companons

Aḍ izumal sleqyuḍ tsekwmamin  Oh compagnons enchaînés et baillonnés

Ḍi yir tamurt ġzmen asen awal        En vils pays où on censure

I wiḍ d innan tiquranine        Ceux qui osent dire la vérité

Aḍ Izumal asvern uysen        Des compagnons qui endurent 

A svern uysen sevren            Qui endurent et n’espèrent plus

Tiyita tebweď si ŷes            Le coups ont atteint l’os

Lihala tmal teġla yessen    Le chaos les a emmenés dans son sillage

Lihal tmal walan tafat mi tselles    Assistant ainsi à l’éclipse du soleil

Times tuŷal ţiremt nsen        Le feu devenant leur seul butin

Tiŷri teched i yiles            Le cri leur sortit de la gorge

Aḍ izumal sleqyud ţukmamin       Oh compagnons enchaînés et baillonnés

Ḍi yir tamurt ġzmen asen awal        En vils pays où on censure

I wiḍ d innan tiquranine        Ceux qui osent dire la vérité        

Aḍ izumal neslaya wen             Oh compagnons nous vous avons entendus 

Nesla mi w ngern slassel    Entendus quand ils vous enchaînaient

Yewet uhemal imettawen        Un torrent de larmes a coulé

Lad yesekfal lemkahul            Déterrant ainsi les armes

Rahen iḍammen      Le sang devint nauséabond

Urrif ḍi rrsas layfettel      La colère diffuse ses balles

Ay izumal      Oh compagnons 

S leqyuḍ ţuḳmamine       Enchaînés et baillonnés

Il a chanté et chantera à travers chacun de nous sa Kabylie, notre Kabylie, il est issu des entrailles de ce peuple, de cette terre kabyle, de cette montagne kabyle, son histoire, ses héros à l’image de cette belle chanson qui ancra le combat identitaire dans ses racines profondes. L’ancêtre retrouvé redonne au peuple kabyle sa fierté. Jughurtha est alors ressuscité. 

Ur ẓriɣ ansi-d kkiɣ
Ur walaɣ s anda tedduɣ
Mi kkreɣ ad steqsiɣ
Ad afeɣ liḥala tluɣ
Amzun seg iggeni id ɣliɣ
Ccah deg-i imi tettuɣ
Ccah deg-i imi tettuɣ

Muqlɣ tamurt Umaziɣ
Yugurten walaɣ udem-ik
Nnesma-nni n wanda lliɣ
Hulfeɣ tcewwek s isem-iw
Tabrat-ik segmi i tt-ɣriɣ
Ferheɣ immi lliɣ d mmi-k
Ferheɣ immi lliɣ d mmi-k

Beddeɣ di tiɣilt sawleɣ
Tiɣri-w teɣli ɣer walluy
Mekkneɣ lewhi-w ad sleɣ
Alleɣ itezzi irennu
Tdal-d lqebla muqleɣ
Tumer-iyi-d tennad knu
Tumer-iyi-d tennad knu

Mazal ad neɣz ad nmuqel
Ad nelḥu, ad nesteqsi
Ulac tardast ara nezgel
Ad nessiɣ tafat ma texsi
Ma nḍeggeɛ lkenz n leɛqel
Aneɣrum-is ulansi
Aneɣrum-is ulansi

Idir a voué tout son amour avec sincérité, constance, une grande sensibilité  et beaucoup d’humilité à son peuple, à ses villages kabyles, aux hommes, aux enfants et aux femmes.  Idir est et sera pour nous le symbole de la tolérance, du respect de nos différences et de notre diversité et il est resté un farouche défenseur de sa Kabylité.  

Et comme son ami Lwenas, Idir était profondément attaché à son algérianité dès lors que ce pays qu’il chérissait tant  l’’acceptait dans sa singularité de kabyle. Il aimait dire ceci : « En Algérie, on accepte de me délivrer un passeport, mais on m’empêche de parler, enseigner et cultiver ma langue. En tant que kabyle, je voudrais être un algérien à part entière et non entièrement à part, comme c’est le cas aujourd’hui. »

Cette année 2020, sera pour tous une année inédite et pour nous kabyles à plus d’un titre. La perte d’’Idir dans ces moments de confinement sera une douleur qu’il sera difficile d’exprimer. Comment en effet accepter notre sort et accepter ainsi de ne pas accompagner notre chantre à sa dernière demeure, lui qui nous accompagnés tout au long de notre vie, lui qui nous a bercés ? Comment ne pas être aux côtés de sa fille, de ses proches dans ces moments de deuil? 

On continuera ainsi à penser à lui, à porter haut et fort son message de tolérance, à chanter haut et fredonner son œuvre, porte flambeau de notre culture, de notre histoire, de notre identité qu’il a porté au-delà des frontières de notre Kabylie. 

A bientôt cinquante années consacrées pleinement à son art, profondément ancré, à l’image de l’olivier,  dans les profondeurs de notre terre et de notre terroir, Idir nous lègue une œuvre consacrée, sans relâche, à la dénonciation de toute forme d’injustice,  de d’obscurantisme sous toutes ses formes, à la défense des valeurs humaines de tolérance et de respect des différences.  La chanson « A jeggig » en est le témoignage poignant de son combat. 

Isaggaḍen n tafat            Chasseurs de lumière

Aḥ yeġma ujeḡiġ ḍi lefjer        Une fleur éclot ce matin

Aḥ yecraq yitij f ssifas            Le soleil éclaire sa beauté

A iŷad yiwen was kan ig dder        J’ai peur qu’elle ne vive qu’un jour

Ima cfan akw medden fellas        Que les gens ne s’en souviennent

A wer yessin meskin wemġer        La faucille est ignorante 

Yeḳcem ŷer yiger            Qui pénètre les tiges

Aḥ i ġezmit ḍi ţnasfa            Et les coupe en leur milieu

Aḥ ŷas yemut macci yenġer        Mais même mort il reste vivant

Imi azeka ad yeker ġmas        Car demain naîtra son frère

Uḥ tezram achal ḍ ajeggig yemŷin    Que de fleurs renaîtront

Ḍ ţġuj ḍ a yulin                Que de piliers se dresseront

A nufa asmi ŷ dyebwad u hemal    Nous vîmes à l’arrivée du torrent

A nufa ziŷ kra ibedden yetsmal        S’affaisser tout sur son chemin

Wer nuki mi gewet lebraq        L’éclair * nous a échappé    

Tarsed tafat seg ġeni            Et une lueur nous éclaira du ciel

Yenḥez weḍrar yeṭarďaq        La montagne s’est ébranlée

A zḥir ur iban ansi            Son origine nous échappa

Aniḍat ujeḡiġ iŷab            Où est la fleur* cachée « savant »

Yaεraq ḍayen iruh awi zran sani    On ne sait où elle a disparu

Aḥ refḍent i sagaden n tafat     Les chasseurs de lumière l’ont enlevée

Wiḍ yezḍeŷn akin i w aġu        Qui derrière les nuages s’éclipsent

Imnayen ḍat twenza ur yedal tuyat     Les cavaliers sur leur monture ailée

At lebraq seg fus lay lehu        En un éclair l’ont rattrapée

A fkant i wagur wu lmaryat        Et vers la lune ils l’orientèrent

Ġer yetran yerrat            Et entre les étoiles l’ont placée

A ġarasen aḍ yeḍḥu            Afin que parmi elles elle évolue

Aḥ yaεraq ḍeg ġeni nwalat        Dans le ciel nous l’avons repérée

Aḥ meskin yugaḍ at netsu        Elle a peur d’être oubliée

Uḥ itran uran ismis ḍi teġnawt    Les étoiles l’ont fixée au ciel

Uḥ ur yezmir hed at yemhu        Et nul ne peut l’effacer

Ma twalam itri iwumi tzal tafat        Si étoile scintillante vous observez

Zert ḍ neţa iŷd iḥḍane asefru        C’est elle qui nous adresse un poème

Ma twalam itri iwumi tzal tafat        Si étoile scintillante vous observez

Ah, cfut ḍ neţa iŷd iḥḍane asefru    C’est elle qui nous adresse un poème.

 

«Ma twalam itri iw umi tzad tafat, zert et hsut dh netsa igh d ihdhan asefru – Si vous voyez une étoile qui brille fortement, sachez que c’est elle (ici le poète) qui nous adresse son poème. Idir était très fortement attaché à une grande figure de la culture kabyle, originaire d’At Yenni comme lui et à qui il vouait un énorme respect. Respect pour se droiture, sa modestie mais aussi et surtout pour l’œuvre colossale accomplie pour la sauvegarde de cette culture kabyle, Amazigh. Cette éminente personne c’est le regretté Dda Lmouloud Nat Maammar.  Pour célébrer l’’écrivain, le chercheur, le poète, Idir lui dédia cette belle chanson : « Amedyaz – Le poète».

 

Allen iw ger itran
Tsnadint igenwan
Wissen anda tellîdh
Tiziri yedwan
Tessard iszekwan
Wis ma’gh d t tswali
Negwrad d imeghban
Mi gh ikelx zzman
Ggudjlen w ussan
Inghaten usemmîd
Anwi id as innan
Lefraq yes s âdan
La y tstru umkan
Anda ik rran
Anda ik djdjan
Wissen anwa i d itri
I deg i tettilîd
Nesawel i yal amkan
Ur neszri anida tensîd

Tawrirt n Mimun
Anda fellak run
Dinna id tettnerni
Sennig lkanun
Lefnar yettargun

I tmendârt sligh

Ayyen igh d ‘hekkun
Imgharen isefrun
D agwni ittwattun
Dinna it en turîd
Ad fellak cfun
Ulamek ar k ttun
Ulamek ar k m’hun
Ghas ulac ik tellîd

Tura d imeghban
Imi gh ikelx zzman
Ggudjlen ussan
Inghaten usemîd
Anwa id as innan
Lefraq isâdan
La ittru umkan nni
I deg i tettghimîd

Anda k rran anda ik djan
Wissen anwa i d itri
I deg i tettilîd
Nsawel i yal amkan
Ur neszri anida tensîd

Dans son combat sans relâche et d’une constance sans faille, Idir se savait, en homme sage qu’il était et enseigné par la vie, vie dont il porte bien le nom, ces derniers temps traqué par la mort. Il l’a côtoyée en permanence au point où elle est devenue un ami-ennemi dont il ne pouvait se passer. Il nous y a préparés de longue date. Dans son combat contre sa maladie, Idir l’a combattue dignement et avec la sérénité et le calme qu’on lui connait. Sa chanson « Lmut » vient ici à point nommé. 

Comme a-t-il vécu ce moment où la mort vous approche. J’espère qu’il l’a affrontée sans souffrance. Je t’imagine là dans une position seigneuriale, la saluer en retirant ton fameux chapeau noir, tirer ta révérence à la vie qui t’a tant donné et à qui tu as tant donné en retour. 

 

Lmut                         La mort

I ḳuḳraŷ ḍ aŷbel n lmut          Je crains l’angoisse de la mort

Asmi ad yerzu ŷuri                Le jour où elle se présentera à moi

Mi sliŷ s tizyaw temmut         Quand j’ai appris la mort des amis

Ugaḍeŷ ula ḍ nekki ni            La peur s’est emparée de moi

Yeŷlid tlam ŷef tmurt             Le village sombre dans les ténèbres

Asmi d bweď lmut                Le jour où la mort l’a atteint

Tebwďed teżeld afus is        Elle est là tendant sa main

Kulwa yegguni tabburt           Et chancun la guettant au seuil de sa porte

Argaz tamettut                Hommes et femmes

Yerġaġi ŷef w arraw is a yemma yemma    Tremblant de peur pour ses proches

Ula ḍyiwen maḉi teţut            Mais la mort n’épargne personne

Acimi ara nrut                    Alors pourquoi pleurer, se lamenter

Am kulwa a tidyas was is            Chacun connaîtra son jour

I gemmuten dizumal mazal umazal        Tant de compagnons sont morts

A ţirni iţ msetbaεen ayema yema        Se suivant les uns les autres

Ḍel mektub neŷ ḍ lmijal        Est-ce leur destinée ou leur jour venu

Yeḉaten wakal                La terre les a ensevelis

Ay asmi εddan ruhen a yema yema        Leur passage fut éphémère

Ayen iruhen ur d yeţuŷal            Et le souvenir de leur passage

Siwa ḍeg w awal                Seuls les mots le consacreront

Atni d ţadren medden ayema yema        Seuls les gens se le rappelleront

Allah, Allah                     Allah, Allah

Iŷadiyi uġettum n llim                Seule me peine la tige du citronnier

Yezlen di tesġa am saru            Gisant dans un coin telle une tresse

Allah, Allah, Allah                Allah, Allah, Allah

A maken is cudden aŷusmar            Et qu’on lui attacha les mâchoires

Tizya s trefḍ asefru              Et ses compagnons lui dédièrent un poème

A maken is meḍlen allen            Et lorsqu’on lui ferma les yeux

Yemma s taεzizt a teţru            Sa chère mère fondit en larmes

Lukan ḍ lεabḍ it yenŷan            Si sa mort était un fait d’homme

Nek yiḍes ar nemsegru            Je le combatterais sans concession

Imi ḍel mut a yagi                Mais c’est la mort naturelle

A nerfeḍ isem is xir ma nru        Chantons son nom et évitons de pleurer.

Oui Idir nous a quittés mais son œuvre le maintiendra vivant pour nous, pour l’éternité. Oui on le retrouvera dans chaque enfant qui fredonnera ses chansons, dans la voix de chaque maman qui entonnera ses berceuses, dans SSendou.  Oui on l’entendra au-delà des mers et des frontières. Oui on l’écoutera dans la voix de Tanina, de Stina la Finlandaise,  de Maxime Le Forestier, et d’autres voix.    Oui demain on chantera Idir à Paris à Tokyo, à Alger et Moscou, à Tizi et Helsinki, à Berlin et à Turin.

Oui demain, « A vava inouva » resonnera à travers toutes les villes de la planète. Oui comme ses milliers de personnes qui tous les soirs rendent hommages à toutes ses personnes qui soignent, demain nous la chanterons tous en cœur. Elle restera gravée en nous comme sont restées gravées les inscriptions de notre histoire berbère millénaire sur les parois du grand et immense Hoggar. Oui on entonnera tous demain et après-demain « Avava inouva » et bercerons nos enfants et petits-enfants aux rythmes de « Ssendu » et bien d’autres chansons que tu nous laissées en héritage. 

Non ta voix ne s’est pas tue. Elle restera éternelle et résonnera demain, cet été comme le suivant, et dans les foyers, durant les fêtes, en chœur,  on entonnera Zwits rwits, Ay azwaw su mendil awragh. Non on entendra toujours ton vibrant message de vigilance quant à notre identité. Cette identité que tu as défendue avec amour, avec passion mais aussi sans violence. Tu nous as ainsi montré qui nous sommes. « Amli yi » est là sera éternellement là pour nous rappeler qui nous sommes.

Mliyi                Dis-moi

Mliyi abriḍ n tlelli         Dis-moi où mène l

Sanga ye tsawi            Le chemin de la liberté

Abriḍ yeţawin             Ce chemin qui mène

Yekkad si tuḍrin        Il provient des villages

Isub si ŷuzran         Mène vers les torrents (fleuves)

Yelhaq timḍinin        Et atteind les villes

Yeţawi ŷer tafat        Et mène vers la lumière

Sanga ur neţmeţat        Là où on ne meurt pas

Abriḍ llejḍuḍ            C’est le chemin des ancêtres

Ibaned n walat        C’est bien lui on le reconnait

Amiliyid tiŷri             Dis-moi l’appel 

Lejḍuḍ isehhan            De ces vrais des aîeuls

Anwi is yeslan            Qui l’a entendue

Taŷuct ay sliŷ        La voix que j’ai perçue (entendue)

Yerna tsin bŷiŷ         C’est celle que je désirais

Ḍ acewiq yelḥan    C’est un bel acewiq (cantate)

Id yecna w maziŷ        Voix chanté par l’Amazigh 

La yeqqar ŷurwat         Qui dit : « prenez garde »

Lwaqt akw nifat    Que le temps ne vous trompe

Atfet ḍeg zuran  Prenez-soin de vos racines (origines)

Telhum ŷer zḍat   Et regardez vers l’avenir

Amiliyid Rebbi            Dis-moi si Dieu 

Ixelqaŷed ḍ leqbayel        Qui créa les kabyles   

Wissen anda yexser            Où s’est-il trompé

Miliyi d              Dis-moi                  

Ixelqaŷed ḍ leqbayel            Il nous créa kabyles

Acuŷer ig beddel            Pourquoi a-t-il changé  

Ur yelli ḍ Rebbi    Ce n’est point Dieu qui voulu ceci

Ig bŷan tagui           Celui qui voulu ceci

Anwi ţ ixeḍmen            Et qui l’a bien fait    

Ḍ lεabḍ am nukni         C’est un être comme nous  

Yetsnaḍi ar neŷfel        Qui cherche à nous leurrer

Miŷ yeḡa lasel        Et nous prive de nos racines  

Yeksaŷ tameslayt             Et de notre langue 

Iwaken an beddel         Pensant ainsi nous changer

A miliyi d            Dis-moi                              

S yeŷriben n theyar      Nous émigrés, sommes intrigués

Ansi id nuŷ azar            D’où nous venons ?  

Ḍ arraw iḍurar        Nous venons des montagnes  

Xas ma ḍ iŷriben  Bien qu’émigrés 

Ulamḳ at nenkar            Même si on le renie 

A ṭir inasen                Dis leurs toi l‘oiseau 

Ŷas baεḍent wallen        Bien que loin des yeux

Nem qarab ḍeg ul    Nos coeurs vous sont proches

Aqlaŷ garawen        Nous sommes des votres     

A mli yi                      Dis-moi 

Ma s taεrabt igura ddin  Si le Coran est en arabe

I nukni ur ţ nefḥim    Et nous ne la comprenons pas

A mliyi ma                 Dis-moi si               

Ini inselmen                 Dis, les musulmans

Maḉi ala dhi aεraben    Ne sont pas tous des Arabes

L’Islam isahed            Et que l’Islam appartient  

I ḳra bw it yumnen            A tous ses croyants

Setmeslayt ines             Chacun le paratique

Yal wa iεabd it                Dans sa langue 

Yelha ixeḍmit                 Et c’est bien ainsi

Setmeslayt ines        De la pratiquer dans sa langue

Nukni s teqbaylit    Et nous ce sera en kabyle 

A mli yi taqbaylit     Dis-moi comment le Kabyle*

Ameḳ ara tedder         Peut-elle vivre (survivre)

Mur s digwri later        S’il on lui coupe ses racines

Ayaqcic arras            Ô enfant réponds-lui

Ayizimer ksas            Ô toi l’agneau aussi

Wi bŷan taqbaylit   Qui veut ou tient à la langue kabyle

Aḍ yissin tiras            Doit connaître son écriture

Awal ḍ usefru             Son vocabulaire et sa poèsie

Uqebl at neţu            Avant qu’on ne les oublie

Asa εynani        Aujourd’hui sans nous cacher

Aḍ yehfedh tiras     Il faut apprendre son écriture

Awal ḍ usefru         Son vocabulaire et sa poèsie

Uqebl at netsu         Avant qu’on ne les oublie

Awal ḍ usefru         Son vocabulaire et sa poèsie

Uqebl at neţu        Avant qu’on ne les oublie

Asa εynani        Aujourd’hui sans nous cacher

Ḍi lkaŷed at naru    Nous la fixerons par écrit

Pour t’accompagner vers ta dernière demeure, celle qui nous attend tous, quoi de mieux (je suis sûr que tu partageras ce plaisir ma pensée) que de citer ton ami et compagnons de toujours Lwenas qui avait toujours une pensée vivante en toi. Tu nous répétais constamment que Lwenas était toujours là. 

Ddunit felli at keffu                                 Abrid s azekka yengger                              Lgettaw arts staafu                                  Ur yetszad dgi uhebber                              Ul iw yeqber yenter                                  Yegga yi sber                                     Ssura ikecmits burekku   

A sidi Rebbi kkes felli lwahc uzekka                      HulfaY ad teddu atsaya                              Lmut Yer Yuri                         Qqimet a lehbab beslama                              Yidhwen dhayenni

Et bien vas le rejoindre pour  vous tenir compagnie. Et de là où vous trouverez veillez sur nos générations futures et envoyez-nous votre message de soutien et d’alerte. Votre combat doit se poursuivre.

La mort est question de destinée et comme dit la sagesse kabyle « Ayen yuran dhi twenza ur tsefdhen iffasen ». Ton heure est arrivée et tu l’as accueillie avec sagesse et sérénité. Tu nous as toujours apporté de la joie dans nos foyers, dans nos contrées. Et cette joie m’amène à finir cet hommage dans la joie de la vie et je vais citer la chanson qui célèbre tudert, la naissance et symboliquement célébrer Idir qui signifie la vie. Célébrons la vie, ta vie. « Ay l xir inu »

 

Ay a lxir-inu fukken imetawen
A ttejra  lehlu tesgem-d afriwen
Yewet-d ubahri  llehna
Izzuzen ulawen
Ay a lxir-inu
Wexer-et aka ay at wexxam
Awnettigh d azrem
Limmar win itthazagh s yiles-iw
Ad felli tezm-em
Anefrah i bab n tmeghra
Winna i mu yecbah yisem
Ay a lxir-inu
Esligh i layadh d areqaq ghar tama n ufella
Esligh i llufan yujjaq ay ilul di lhara
Edhsan wudmawen
Ad esneg tameghra
Ay a lxir-inu
Ihub leghwabi, ludha d usawen
Iwet-d ubahri d arqaq
Yesself udmawen
Heggi-mt lhenni i win aezizen
Ay a lxir-inu …
Ay a lxir-inu …
Ay a lxir-inu …

Idir qui signifie vivre a vécu pleinement sa vie d’artiste mais aussi d’homme. Il nous laisse tous orphelins  comme nous Dda Lmouloud dont tu as si bien évoqué la perte quand tu chantais : 

Negwrad d imeghban
Mi gh ikelx zzman
Ggudjlen ussan
Inghaten usemîd
Anwi id as innan
Lefraq isâdan
La ittru umkan
Anda ik rran
Anda ik djdjan

Oui aujourd’hui c’est notre tour d’être les orphelins de Idir. Orphelins qui avons pour dure mission : poursuivre son combat pour les libertés individuelles,  pour plus de justice, pour une Algérie enfin réconciliée avec son histoire, une Algérie fière de son identité, une Algérie riche de sa diversité, une Algérie tolérante.

Drôle de coïncidence, ton ami, ton compagnon nous a laissé aussi par un samedi. Va ainsi le rejoindre. Il t’attend. Rassure-le et sois toi aussi rassuré les bourgeons du printemps berbère que nous avons célébré cette année dans le silence du confinement vont éclore et continueront d’éclore pour que votre œuvre collective soit menée à bon port. 

Vas Hamid, vas ton œuvre, tes chansons s à l’image de celles de tes aînés  Slimane Azem, Lhesnaoui, Cherif Kheddam et bien d’autres encore resteront éternellement présentes. Tes chansons continueront à bercer notre quotidien et demain celui de nos enfants et petits-enfants.

Vas Hamid vers là où des voix t’appellent. Celle de ta maman, celle de tes ancêtres, celle des poètes et écrivains et de tous ces artistes épris de liberté et de justice. 

Que ton âme repose en paix à côté de ceux qui t’ont guidé dans ta vie artistique. Vas retrouver tes aînés. Salut Le grand Cheikh Lhasnaoui, sans oublier le barde le barde Dda Slimane et le maestro Dda Cehrif, salue-les tous un par un et dis leur que la culture kabyle est entre de bonnes mains. 

Oui comme tous ces artistes Idir tu seras toujours parmi nous. Oui tu seras éternellement présent dans nos discussions, nos rêves, nos pérégrinations, dans nos livres, nos écoles. Oui tu nous accompagneras comme une ombre, notre ombre de jour comme de nuit, hiver comme été. Oui on suivra ses traces- 

Aneddu dhi latr ik,                                 An kemmel abridh ik                                 Ad nernu deg awal ik                                 Iwakken adh yiYzif laamer ik.

    Idir yella yella                                 Tellidh idelli                                      Tellidh assa assa                                      Ats ilidh  azekka                                     Garanegh tellidh lebdha                             Win s innan Yidir yemmut                          Winna hesbit yesrugmut                             Yurwat, yurwat at n tsut                             Yas akka tebwit lmut                                 Awal id yegga yedhhar                             Ilaq adh sneg leqrar                                   Awa lis ar dh at naru                                  At nesselhu  at nessefru                                Abrid id yegga yenggar                              IlaqY ar dhat nedfer                                 Yurwat hadert awal is                                 Ur tetsut isem is                                     Cfut ddut dhi later is                                 El Hamid yella yella                                 Yella idelli                                           Yella iw assa                                      Adh yili azkka                                     Adh yili i lebdha     

Vas Hamid, vas Idir et que ton âme repose en paix et comme le disent les gens de chez qu’elle se retrouve dans le vaste paradis auprès de ta maman chérie.  

Vas, vas rejoindre la galaxie et d’en haut rejoindre les étoiles que tu nous feras scintiller et briller afin qu’elles puissent éternellement nous guider et indiquer ta trace.

Je ne te dirai jamais adieu Idir. Tu seras là et ta voix planera au-dessus de moi, de nous.  Au revoir l’artiste. Aujourd’hui je te tire mon chapeau. Merci pour cette belle aventure qui restera gravée à jamais dans nos mémoires.

    
(*) Je ne peux prétendre connaître Lhamid l’homme ou Idir l’artiste. Je ne fais que rendre modestement un hommage à une personne, un personnage qui a marqué notre vie. Notre très modeste connaissance de l’artiste tient tout simplement de la même connaissance de son grand auditoire dont nous faisons partie comme tant d’autres f

Auteur
Arezki Khouas

 




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