28 mars 2024
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Ô vous qui parlez au nom d’un peuple ressuscité, par Mohamed Benchicou

REGARD

Ô vous qui parlez au nom d’un peuple ressuscité, par Mohamed Benchicou

Aujourd’hui, 26ème vendredi partagé entre Dieu et l’espoir, six mois jour pour jour, six mois de protestation parmi les plus spectaculaires de l’histoire et, regardez-les bien, ils sont prêts pour six autres mois.

Maintenant qu’il sont revenus de la mort, la vraie mort, pas celle qui vous emporte mais celle qui vous abandonne dans l’illusion de l’existence, la mort insoutenable et invisible qui devient votre triste compagne, quand chaque jour s’annonce comme un supplice et qu’elle, la mort, vous réduit à la supplier de vous arracher à ce monde où vous n’avez plus de place, oui, maintenant qu’ils ont ressuscités, ils ne comptent pas retourner dans ce lointain caveau où gisaient les dépouilles de quelques anciennes espérances.

Ils ne craignent plus d’affronter le Diable en plein jour. Ô vous qui parlez au nom d’un peuple sans voix mais pas sans mémoire, avez-vous mesuré l’étendue de sa colère ? Une colère nue, brute, qu’il est courant, chez nos sots dirigeants, de confondre avec la mauvaise humeur des infortunés, celle que M. Sellal suggérait calmer avec du couscous, la colère que l’on porte, chez eux, de père en fils, de mère en fille, comme un tatouage de parias.

Saurez-vous parler à la hauteur de leur intransigeance ? Cette révolution c’est leur Novembre à eux. Pas le Novembre des commandants auto-proclamés, Novembre des héros bricolés devenus cambrioleurs.

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Pas ce Novembre qui a enfanté l’indépendance de quelques-uns, le Novembre qu’on ne commémore plus, celui d’une guerre dont les jeunes ont fini par ne plus savoir si elle avait été gagnée ou perdue, ce Novembre qui a enfanté el issaba, comme ils disent, el faced, autant de termes à la mode, la vilaine mode d’une époque amnésique où l’on assiste à la triste fin des mythes et des mythomanes.

Gardons-nous de rabaisser cette Révolution à ce qu’elle n’est surtout pas, une jacquerie passagère, une mauvaise humeur d’un peuple fatigué. Cette portestation-là est lucide, éclairée, perspicace. Déterminée.

Les manifestants savent parfaitement ce qu’ils veulent. Le pain et la dignité. Le pain et la justice. Le pain et l’identité. Ils veulent renationalser leur pétrole et redonner une ambition à ce pays, ils veulent chasser les indus occupants et retrouver leurs pères et leurs mères, se situer dans leur profondeur historique.

Ils portent les portraits de Lakhdar Bouregaâ, de Messali Hadj, d’Abane Ramdane, de Ben M’hidi, de Ben Boulaïd pour revendiquer la réapropriation de leur histoire, le droit de se reconnaître dans la filiation confisquée, étouffée d’une vieille bravoure.Ils revendiquent une identité historique, éloignée de cette légitimité historique qu’on nous impose comme la justification de leur domination, l’équité sociale, un vrai état de droit, modernité et le retour à leur véritable identité. Oui, c’est d’un nouveau Novembre il s’agit.

D’une reconquête de notre histoire, sans ces amputations que l’on pratique sur la vérité, sans ces procureurs qui caricaturent l’histoire entre traîtres et héros, s’arrogeant le droit divin de dire qui fait partie des uns et des autres. Voilà 60 ans qu’on nous impose un passé qui marche sur une seule jambe.

Qui révélera aux enfants de notre pays qu’ils sont les enfants d’un combat ancien, que la lutte pour l’indépendance n’a pas commencé en 1954, mais en 1923, quand le mot indépendance fut lâché par le couple Messali Hadj – Emilie Buscant. Ce sont toutes ces omissions volontaires qui empêchent l’Algérien de se revendiquer d’un honneur ancien. Ô vous qui parlez au nom d’un peuple rabaissé, avez-vous pris la précaution de soupeser l’immense simplicité  de leurs exigences, de pénétrer dans la richesse de leurs espérances.

Ils ne demandent pas le droit de survivre. Ils réclament le droit de vivre et, voyez-vous, je ne crois pas que vous trouverez des oreilles à la hauteur de la noblesse de leur projet.

Cette révolution n’est pas réductible à des tractations d’apothicaires. C’est un immense projet de société qui est en jeu.

Ne vous trompez pas de finalité : Ce n’est pas d’une sortie de crise dont il est question mais d’une entrée dans une ère nouvelle. Il n’y a aucun compromis possible.

Sans cette détermination, eh bien sans le refus de compromis avec Bouteflika sans le rejet net et brutal des propositions de compromis avec l’ancien chef d’Etat, hé bien rappelez-vous mes amis, hé bien nous serions encore gouvernés par les hommes qui croupissent actuellement à El Harrach.    

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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