19 avril 2024
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Pour qui travaillaient Bouteflika et Khelil ? Par Mohamed Benchicou

LOI SUR LES HYDROCARBURES

Pour qui travaillaient Bouteflika et Khelil ? Par Mohamed Benchicou

La manifestation, ce dimanche 13 octobre 2019, devant l’Assemblée nationale en protestation contre la loi sur les hydrocarbures est un événement majeur pour les Algériens : il signifie que dorénavant, les affaires pétrolières et financières ne se feront plus sans eux.

C’est une rupture capitale avec l’ancienne conception de la gouvernance qui attribuait aux dirigeants le monopole de la conduite des affaires économiques, les Algériens étant exclus de la concertation.

Bouteflika a mis à profit cette « indifférence populaire» qui lui permettait de décider seul de la politique pétrolière du pays avec les résultats que l’on sait. Les manifestants reprenaient en mains leur droit de regard sur la gestion du pays, droit qu’on leur refuse, avec toutes ces élections truquées. La symbolique est frappante : puisqu’on leur interdit d’envoyer des députés réellement représentatifs, ils comptent faire le boulot eux-mêmes ! Le temps de la gestion opaque des affaires de la nation est sans doute en voie d’être oubliée.

Sous Bouteflika, le pétrole était devenu une chasse-gardée

Avec Chakib Khelil, le pétrole algérien échouait entre les mains d’un citoyen américain né à Oujda, au Maroc, autrement dit la personne idoine pour la besogn qui l’attendait : ouvrir les richesses nationales à la pègre pétrolière internationale ; dénationaliser le pétrole comme le souhaitaient les lobbies étrangers qui avaient favorisé l’accès au pouvoir d’Abdelaziz ; s’accaparer des avoirs de Sonatrach…

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Il y avait, cependant, un obstacle: en cette année 1999, le secteur de l’énergie était encore trop bien encadré. Un Conseil national de l’énergie, présidé par le chef de l’État et composé des ministres de l’Energie, de la Défense, des Affaires étrangères et des Finances, supervisait la politique énergétique nationale. Nazim Zouiouèche, un cadre compétent et fidèle à l’entreprise depuis trois décennies, présidait aux destinées de Sonatrach, après avoir succédé à Abdelhak Bouhafs, un autre «fils de Sonatrach», que la maladie de Parkinson a obligé à abandonner son poste.

Qu’à cela ne tienne ! Abdelaziz Bouteflika va dissoudre, de facto, le Conseil national de l’énergie qui ne se réunira plus jamais au cours des 14 années de règne. Simultanément, il va limoger le directeur général de Sonatrach et soustraire la compagnie à tout regard extérieur et à tout contrôle. Chakib la coiffera lui-même, cumulant grossièrement sa haute fonction au sein du gouvernement avec celle de directeur général de Sonatrach qui sera alors gérée dans l’opacité, comme une caisse noire.

Le pétrole algérien devint alors une histoire de famille et Sonatrach un bien privé du clan présidentiel. Chakib en parlait d’ailleurs comme d’une propriété personnelle. Ce fut cette période de « manigances intimes », entre 2000 et 2004, que furent commis les trois plus grands dommages aux richesses pétrolières nationales : la tentative de dénationalisation ; le bradage des hydrocarbures au profit d’intérêts étrangers ; le pillage de Sonatrach avec transferts de fonds dans des paradis fiscaux.

Première grande décision : renvoyer l’ascenseur aux forces qui avaient permis l’avènement du pouvoir de Abdelaziz en dénationalisant le pétrole à leur profit.

Devant les enquêteurs du DRS, certains cadres de Sonatrach ont accusé l’ancien ministre de l’Energie d’avoir trahi le pays et élaboré la loi sur les hydrocarbures, durant les premiers mois de l’année 2000 sous la dictée des grands groupes de la pègre pétrolière internationale.

Le rédacteur de cette loi ne serait autre que Bob Pleasant, «le juriste» américain que Chakib aurait rencontré à la Banque mondiale et recruté au ministère de l’Energie et des Mines dès son installation à ce département avec l’arrivée de Abdelaziz Abdelaziz au pouvoir en 1999.

Bob Pleasant aurait contribué à l’élaboration de plusieurs textes de loi durant «le règne» de Chakib au ministère de l’Energie, dont la fameuse loi sur les hydrocarbures qui autorise un pillage en règle du sous-sol algérien par les majors anglo-saxons moyennant quelques dividendes accordés à leurs amis algériens. Ce texte n’ayant pas fait l’unanimité au sein du clan lui-même, en raison de son caractère outrageusement capitulard, a été retiré par souci tactique. Abdelaziz attendra sa réélection en 2004 pour faire adopter la loi, profitant du nouveau rapport de forces favorable. C’est peut-être ainsi que le président a été réélu en 2004, grâce à la loi sur les hydrocarbures, manifestation concrète de la collusion avec des intérêts étrangers.

Parallèlement, Abdelaziz Bouteflika avait autorisé la cession « en catimini » de l’entreprise Naftal, la filiale de Sonatrach spécialisée dans la distribution des produits pétroliers, au groupe qatari Woqod.

À elle seule, cette affaire confirme bien que l’affaire Chakib n’est pas qu’une banale histoire de dilapidation de fonds publics. Elle est, avant tout, une troublante énigme politique : au profit de quels intérêts étrangers agissait l’ancien ministre de l’Energie ? Et qui lui assurait une couverture pour entreprendre un tel méfait contre son propre pays ? Car cette transaction que s’apprêtait à commettre Chakib  n’était pas seulement une opération blanche pour l’Algérie, elle était foncièrement contraire aux intérêts de l’Algérie.

Dans les documents qu’a pu se procurer El-Watan, l’ancien ministre algérien de l’Energie proposait aux Qataris rien moins que de leur céder les nouvelles stations-service de l’autoroute Est-Ouest après leur «rôdage » par l’entreprise algérienne Sonatrach. Chakib écrit, en effet : « La gestion de ces stations-service sera assurée dans un premier temps par Sonatrach durant moins de deux ans. Après cette période, nous ferons en sorte que les infrastructures réalisées soient transférées pour le bénéfice de votre groupe par le biais d’un avis d’appel d’offres international selon les termes et les conditions que nous avons déjà décidés. Etant convaincu de la réussite de cet important projet, nous resterons toujours prêts à vous assister dans des projets que vous désirez mettre en œuvre».

C’est donc ainsi que l’ancien ministre entendait défendre les intérêts de l’Algérie : « Venez faire des affaires avec notre propre argent ! »

Le bradage de Naftal que se préparait à fomenter Chakib s’intégrait dans une vaste stratégie de démantèlement de Sonatrach, lui-même entrant parfaitement dans le cadre du bradage des hydrocarbures au profit d’intérêts étrangers.

M.B.

Auteur
M. B.

 




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