20 avril 2024
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Quand l’argent facile règne en maître, le diable est premier ministre 

OPINION

Quand l’argent facile règne en maître, le diable est premier ministre 

Ouyahia et Sellal, deux premiers ministres derrière les barreaux

Tous les gouvernements, qui se sont succédé depuis l’indépendance à nos jours, ont affirmé que la construction de l’Etat et le développement économique sont les seuls buts de leurs actions.

Mais ces dirigeants ne définissent nulle part, de quel développement il s’agit, ne précisent jamais vers quel type de société, ils entraînent leur populations.

En réalité, tout se passe comme s’ils voulaient transformer l’Algérie pour la rendre conforme à l’image qu’ils se font de l’Occident, celle de leur enfance c’est à dire semblable à la France d’aujourd’hui avec son urbanisation planifiée, son économie intégrée, sa culture démocratique, sa consommation généralisée Cette fascination pour le mode de vie occidental constitue au-delà des discours le principal moteur de la classe dirigeante. Ce mythe de l’accession prochaine à tous à la société de consommation joue un rôle politique important. Il justifie dès aujourd’hui l’imitation du mode de vie occidental par les classes dirigeantes et l’orientation donnée vers l’extérieur de l’économie algérienne.

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L’exportation des ressources énergétiques appartenant à la majorité permet d’importer des biens de consommation souvent réservée à une minorité. Le développement conçu comme une tentative de généralisation du mode de vie occidental sert donc de prétexte à la formation par l’intermédiaire de l’Etat  d’une couche de privilégiés jouissant dès aujourd’hui de ce type d’existence promis à tous pour demain.

Le boom pétrolier qu’a connu l’Algérie sous le règne de Bouteflika illustre parfaitement la cohabitation entre la permanence d’une misère morale endémique et l’existence de ressources financières abondantes. Le prix élevé du pétrole a structurellement pour effet pervers de perpétuer à l’infini le système mis en place. Il s’agit là d’un Etat clientéliste fonctionnant sur la base de loyautés qui ne requiert aucune croyance dans les qualifications du personnel politique ou économique mais qui sont très étroitement associés à des incitations et à des redistributions matérielles. Ces dirigeants intéressés par les profits personnels oublient très vite qu’ils n’ont de pouvoir que le nom, les maîtres de la mondialisation appliquent aux pays du sud des mesures qu’ils ne se permettent pas de mettre en pratique au nord.

Quand survient le chaos économique et social, la population se retournera vers ceux qui ne sont que « l’ombre du pouvoir ». Le pouvoir local au lieu d’œuvrer pour le bien du peuple agit bien souvent sous la tutelle des institutions internationales. La tragédie est que la population dans sa grande majorité ignore les véritables enjeux.

Tout se passe comme si la population ne devait pas se poser légitimement la question suivante : « le climat social potentiellement explosif a-t-il une cause économique ? Si oui comment générer une économie porteuse de stabilité sociale ? On ne doit pas se poser cette question car cela risque de remettre tout le système en cause.

C’est quoi donc une économie productive porteuse de stabilité ? C’est une économie locale tournée vers la satisfaction des besoins de la population locale et non d’un occident en crise. La coexistence de la misère et de l’abondance devient chaque jour plus intolérante et l’on assiste à des pressions de plus en plus fortes à des revendications visant à une redistribution plus égalitaire des revenus. Des populations se sentant abandonnées à elles-mêmes, n’ont plus aucun intérêt à l’Etat. Le pouvoir ne leur apparaît plus crédible, il ne satisfait pas à leurs besoins.

L’Algérie est-elle condamnée à la fatalité d’un pouvoir fort de la dictature ?

La dictature pourquoi faire ? Pour construire l’Etat ? Pour assurer le développement ? On le prétend mais elle ne bénéficie qu’à une infime minorité. Quant à la démocratie, qui la réclame ? Des intellectuels en mal de reconnaissance à la fin de leur carrière professionnelle ? Des  anciens commis de l’Etat qui rêvent de revenir aux affaires avant de s’éteindre ? La génération de l’indépendance qui manque d’expérience dans l’exercice du pouvoir ? Une population infantilisée qui court derrière le sachet de lait produit à partir d’une poudre importée ? Des notables qui ne sont pas sortis du douar pour prétendre entrer dans la cité ? Des leaders de partis sans ancrage populaires et sans convictions idéologiques ou religieuses affirmées vivant des subventions de l’Etat ? Des affairistes qui cherchent à blanchir de l’argent mal acquis ?

Des pseudo-industriels qui courent derrière une amnistie fiscale ? Des hauts fonctionnaires qui veulent se perpétuer dans leurs fonctions officielles malgré leur âge avancé ? Des jeunes universitaires qui veulent s’investir dans la politique pour s’accomplir et ou s’enrichir ? D’autres interrogations, la démocratie n’est-elle pas une notion étrangère à l’histoire et la culture des sociétés maghrébines patriarcales décadentes ? N’est-ce pas un luxe pour un peuple qui ne survit que grâce aux subventions de l’Etat et des revenus distribués par l’Etat ?

Cette dépendance totale de la société à l’égard de l’Etat providence n’est-elle pas un obstacle majeur à la construction d’une démocratie ? L’Etat est-il ce « veau d’or » qui résout tous les problèmes d’une société sans âme ? La providence est-elle au sommet de l’Etat ou dans le sous-sol saharien ?

Qui tient les cordons de la bourse et décide de son affectation ? C’est celui qui dispose des recettes des hydrocarbures c’est-à-dire celui qui est propriétaire des gisements pétroliers ? Qui en est le propriétaire ? L’Etat ou la Nation ? Peut-on accéder à la démocratie sans se libérer de cette dépendance de l’Etat providence ? Un des moyens est de créer des richesses en dehors de l’Etat à l’instar les sociétés européennes.

Nous accusons un retard de trois siècles. La démocratie n’est pas du prêt à porter et encore moins à importer. Elle ne s’achète pas. Elle s’acquiert par l’effort et le savoir. Elle suppose l’existence d’une économie diversifiée et performante, une libération de la société de la providence étatique et une participation éclairée aux décisions étatiques.

Dans les sociétés occidentales, la démocratie correspond à leur trajectoire historique, à leur maturité politique, à leur élite intellectuelle éclairée et éclairante, à leur contribution au financement des dépenses de fonctionnement et d’équipement de l’Etat, à l’obligation des gouvernants de rendre compte de l’utilisation des deniers publics dans un cadre transparent.  La démocratie est une donnée endogène à la société européenne qui reflète sa propre histoire gréco-romaine et ses propres croyances religieuse, elle a été vécue de l’intérieur avant de s’imposer au reste du monde.

Dans les pays rentiers comme l’Algérie, où l’Etat est tout, la société n’est rien, l’élite au pouvoir, bien que vivant de l’Etat n’a pas le sens de l’Etat mais seulement de ses intérêts.

 

Auteur
Dr A. Boumezrag

 




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