20 avril 2024
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Simple et pas simple : l’équation impossible

GUEGUERRE DES WILAYAS

Simple et pas simple : l’équation impossible

Les Algériens assistent dubitatifs à l’arrestation de trois piliers du système Bouteflika, et même de celui d’avant, pour deux d’entre eux. Ces trois personnalités sont arrêtées au même moment. Elles sont placées en détention provisoire et inculpés pour atteinte à l’autorité de l’armée. Les trois civils sont mis, on ne sait comment, sur le même piédestal. Ils comptent parmi eux deux généraux des services secrets à la retraite, et pas des moindres, avec  un ex-conseiller à la présidence frère d’un ex-président. Ils sont jugés par une cour militaire. Ce qui trouble doublement les marcheurs.

Saïd Bouteflika est dénoncé par le général à la retraite, Khaled Nezzar, réputé pour ses talents de conspirateur, et ami de toujours du général Toufik ; le général janviériste, connu pour ses prises de position éradicatrices, est réduit au silence pendant plus de quinze ans et obligé à rester confiné en Algérie grâce au savoir-faire et aux relations du clan Bouteflika.  

Le général Toufik est « donné » par un ancien apprenti-maçon corrompu et corrupteur qu’il élève lui-même au rang de Richelieu algérien.

Leur arrivée, déambulant, dans l’enceinte du tribunal militaire de Blida est filmée par la télévision nationale et fait le tour du monde.

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Selon certains spécialistes ils encourent de 5 à 10 ans de prison voire même l’exécution. Selon d’autres juristes interrogés sur les plateaux télé, cette accusation ne tient pas la route d’un point de vue légale, et n’a aucune chance d’aboutir.

De son côté le chef de l’Etat par intérim, Bensalah, plein  de suffisance et d’impertinence, rappelle lors d’un discours annoncé et attendu impatiemment par les algériens durant 48 heures,  la tenue d’élections présidentielles le 4 juillet, après leur avoir souhaité un bon Ramadhan : comme à l’accoutumée la montagne accouche d’une souris

Sur un autre registre on « élit » au FLN un obscure personnage, natif de Tébessa, appartenant au club très fermé des « assembleurs» de matériel   électronique, et ayant occupé la modeste fonction de député « élu » par la grâce de ce que l’on appelle en Algérie, la Chkara (le sac poubelle noir servant traditionnellement de coffre-fort), pendant 17 longues années. Mohamed Djemai, nouveau secrétaire général du  FLN, est appuyé par le très vénérable, honorable mais peu recommandable Amar Saidani, grand gourou à ses heures perdues et à l’origine de la vulgarisation du fameux concept : l’état profond.

L’homme d’affaires et accessoirement SG du PFLN jouit aussi du soutien indéfectible et de l’amitié de Tliba, député d’Annaba, et probablement aussi, gendre du chef d’état-major. Tliba s’est distingué lors de la mort subite de feu le wali d’Annaba monsieur Mohamed Sandid et a fait couler beaucoup d’encre. A peine installé Djemai,  déclame son soutien absolu et totale ainsi que celui du FLN au chef d’état-major. L’axe est, sud-est, en vogue ces dernières années se consolide.

De leur côté Benflis, Benbitour, Mokri  ne cachent pas leur empathie pour Gaïd Salah et leur entière disponibilité pour la participation à une solution musclée. Ahmed Taleb en fin diplomate laisse les autres s’exprimer pour lui. Hamrouche, naguère si réservé, se remet dans la course à coups de contributions journalistiques.

Les observateurs ont comme l’impression de distinguer à l’horizon cette vieille coalition dépassée, de l’est, se rapprochant avec ses gros sabots, à une cadence plus élevé, chaque jour que dieu fait.  Sommes-nous à la veille de vivre encore pour une énième fois cette anachronique guerre de wilayas ? Une prise du pouvoir par les gens de l’est ? Après avoir subi une propagation meurtrière du virus régionaliste de l’ouest dans tous les secteurs pendant ces vingt dernières années, l’Algérie pourrait-elle résister à une nouvelle prolifération de ce même virus venant de l’est ? N’est-ce pas l’ingrédient manquant pour une implosion aux conséquences désastreuses pour ce pays ? Est-ce à ce niveau là que se situe la réponse de l’état-major de notre glorieuse armée aux doléances des manifestants ?  

Après plus de deux mois de marches grandioses et porteuses de beaucoup d’espoir nos marcheurs sont conscients et fiers de ce qui a été réalisé jusqu’à présent. Même si une partie d’entre eux s’interroge sur l’opportunité de mener une campagne contre la corruption à ce moment précis et doute de son efficacité, ils tombent par contre tous d’accord pour dire que leur objectif final est de recouvrer leur souveraineté. C’est-à-dire de choisir librement les personnes qui les représentent. Ils souhaitent œuvrer ensemble à la construction d’une Algérie nouvelle, libre et développé.

Ils demandent d’en finir avec ce système périmé, dépassé, militaro-FLN, qui n’a cessé d’empoisonner la vie des algériens et de leur faire tant de mal depuis l’indépendance. En définitif, leur demande est claire et légitime. Les chemins sinueux empruntés par le pouvoir actuellement, la réactivation de vieux démons, les discours et les actions contradictoires du chef d’état-major ne sont pas de nature à tranquilliser nos manifestants. En ce début de mois de Ramadan, nos marcheurs sont plus dans le doute et l’inquiétude que dans la dévotion et le recueillement.

On pose la question, qui revient sur toutes les langues, à un jeune marcheur taxieur : Gaid Salah va-t-il- satisfaire notre principale demande, soit la tenue d’élections propres ? Est-il du côté du peuple ? Sans hésiter il répond : c’est simple et ce n’est pas simple. Mais pourquoi demande-t-on ? Hé bien c’est simple, s’il veut vraiment remettre le pouvoir au peuple : ils n’a qu’à désigner un comité de gens intègres accepté par la protesta, qui organisera des élections propres. Mais ce n’est pas simple parce que si de nouvelles têtes élus arrivent c’est lui et ses hommes qui seront remis en cause. Qu’adviendra-t-il d’eux ? De leurs enfants ? De leurs biens, leurs privilèges ? Vous ne pouvez pas quand même leur demander de se faire Hara-kiri. Du haut de sa sagesse populaire le taxieur marcheur a tout dit.

Plusieurs hommes politiques et journalistes respectables et respectés expriment leurs idées et développent des théories de sortie de crise plausibles. Certains d’entre eux véhiculent de nobles et de pertinentes idées. D’autres par contre ont vu le niveau des débats sur leurs plateaux télé s’effondrer, au ras des pâquerettes. Ils devraient tous, afin d’y voir plus clair, tout en s’inspirant du pragmatisme de notre chauffeur manifestant, s’atteler à résoudre cette équation impossible: simple et pas simple.  Ce qui pourrait aider nos jeunes marcheurs et faire gagner du temps à l’Algérie.

 

Auteur
Djalal Larabi

 




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